Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  9 mai 2024 — Fête de l’Ascension — Quarantième anniversaire de la SPREV — Eglise Saint-Ronan — Locronan (29)

9 mai 2024 — Fête de l’Ascension — Quarantième anniversaire de la SPREV — Eglise Saint-Ronan — Locronan (29)

Ac 1, 1-11 ; Ps 46 (47) ; Eph 4, 1-13 ; Mc 16, 15-20

Chers amis,

Le symbole de la SPREV, si j’ai bien compris, est une clef qui ouvre non seulement les édifices pour les rendre accessibles aux visiteurs, mais qui ouvre aussi au sens sacré du patrimoine religieux, autrement dit au message évangélique qui s’exprime dans ce patrimoine, si exceptionnel en Bretagne ! Il est beau de pouvoir célébrer ces 40 ans de la SPREV le jour de l’Ascension. Pourquoi ? Parce que justement, Jésus, avant de monter au ciel, donne mission à ses disciples de faire connaître ce message au plus grand nombre. Jésus n’est plus visible aux yeux de ses disciples, mais il n’en est pas moins présent au cœur de leur mission.

Dans cette homélie, j’aimerais montrer en quoi ce patrimoine est vivant, à quel point la mission de la SPREV est pertinente et quels sont les défis qu’elle a à relever pour accomplir cette mission.

Les termes utilisés par Jésus dans l’Évangile de ce jour peuvent paraître durs quand il dit que celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, mais que celui qui refusera de croire sera condamné. Mais il exprime par là l’enjeu vital de cette annonce de l’Évangile et les exemples qu’il donne, avec l’image des serpents, du poison, et de la guérison des malades, ne font qu’exprimer qu’il est venu pour chasser le mal de nos vies afin de nous rendre capables d’accueillir pleinement l’amour de Dieu et d’en témoigner par toute notre vie.
Ce message, les disciples sont chargés de l’annoncer, et ils l’ont fait, dans l’histoire, non seulement par la prédication, mais aussi par la liturgie, qui se célèbre justement dans un cadre artistique, dans la pierre, le bois, les vitraux, les statuts, les vases et ornements sacrés. Votre fondateur, le Père Maurice DILASSER, avait bien remarqué qu’il y avait là un potentiel magnifique pour annoncer l’Évangile au plus grand nombre !

Il a beaucoup insisté sur le fait que ce patrimoine est vivant. Il évoquait le fait que ce ne sont pas seulement des œuvres d’art, mais que ces églises et chapelles sont habitées par une communauté chrétienne qui vient y prier, célébrer les sacrements. Les chrétiens sont les pierres vivantes qui entrent dans la construction de l’édifice spirituel, comme dit saint Pierre (cf. 1 P 2, 5). Et cela se voit aussi par les signes de la vie de la communauté présents dans ces églises paroissiales (décoration florale, nappe d’autel, affichage, etc.).
Il est vivant parce que l’Esprit Saint s’y manifeste dans le cœur des chrétiens qui viennent s’y rassembler… mais pas seulement. Et il l’est plus que nous le pensons en dehors de nos assemblées. Il m’arrive fréquemment de lire dans les lettres des adultes qui demandent le baptême, l’expérience qu’ils ont faite de ressentir une présence en entrant dans les églises et d’expérimenter une paix intérieure, un réconfort. Et c’est cela qui leur a donné envie d’en savoir plus sur Jésus, de mettre en lui leur foi et finalement de demander le baptême.

Quand des guides de la SPREV font visiter un édifice, ils arrivent avec leur propre histoire. Ils sont souvent passionnés d’histoire, mais ils peuvent être encore en recherche sur le plan de la foi, ou avoir encore une foi fragile qui manque de racines et de connaissance. Pourtant, l’Esprit Saint est déjà à l’œuvre en eux lorsqu’ils ouvrent la clef de la compréhension de ce patrimoine aux visiteurs.
Saint Paul ne dit-il pas, dans sa lettre aux Éphésiens que nous venons d’entendre, que Jésus fait des dons aux hommes, et il cite les apôtres, les prophètes, mais aussi « ceux qui enseignent. » Il se trouve que les guides donnent de leur temps pour contribuer à cet enseignement, et ce don est donc aussi un don que le Christ fait aux visiteurs, même si les uns comme les autres ne s’en rendent pas compte !
C’est pourquoi le patrimoine religieux est aussi vivant, dans le sens où l’Esprit Saint travaille dans le cœur des guides autant que dans celui des visiteurs. Et les fruits qui peuvent se produire dans le cœur des visiteurs sont beaucoup plus importants que ce que le guide leur donne à entendre et à voir. Comme le dit saint Marc dans l’Évangile « le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient. » Et ces signes, ce sont notamment la joie intérieure, la paix, le désir d’en savoir plus, tous ces sentiments qui viennent habiter le cœur des personnes qui découvrent le message évangélique à travers ce magnifique patrimoine.
Quand Jésus dit au moment de s’élever vers le Père « le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins… jusqu’aux extrémités de la terre. » Cela ne concerne pas seulement les apôtres, mais aussi les guides de la SPREV et certains visiteurs qui viennent parfois de loin, et qui à leur tour pourront témoigner de ce qu’ils ont vu et entendu.

Mais quels sont les défis que la SPREV a à surmonter, comme je le disais au début ?
Comme vous le savez bien, depuis la fondation de la SPREV, la société a considérablement évolué sur le plan de son rapport à la religion. Il y a 40 ans, lorsqu’un guide évoquait l’Annonciation, l’Ascension ou la Résurrection, les gens voyaient plus ou moins de quoi il s’agissait, car la plupart avaient été au catéchisme. Aujourd’hui, ces mots sont du chinois pour beaucoup d’entre eux. Ils ne voient pas du tout de quoi ni de qui il s’agit. Quand ils voient un calvaire ou qu’ils entrent dans une église, tout est étrange et mystérieux. Et cela, autant pour les adultes que pour les enfants.
Ces personnes ne sont pas pour autant hostiles à la religion. Mais le défi est que nos guides doivent en tenir compte avec aussi d’autres visiteurs qui ont tout de même une certaine connaissance de la foi chrétienne ! Il faut donc tester son auditoire pour savoir s’ils ont un minimum de connaissance biblique et faire de plus en plus des visites de type catéchuménales, c’est-à-dire d’une initiation à la foi chrétienne.

Mais comment faire ?
Les guides ne peuvent pas non plus faire une séance de catéchisme ! Ils n’en sont d’ailleurs pas forcément capables ! Mais ils doivent se familiariser avec ce qu’on appelle « la Première annonce », c’est dire, non seulement dire qui est Jésus dont on parle dans ces œuvres d’art, son histoire, mais aussi le fait que si des croyants ont construit cela et que des hommes et des femmes continuent de se rassembler ici, c’est parce qu’ils croient que Jésus qui est mort sur la croix est ressuscité et désormais vivant, qu’il les délivre du mal et du péché et les fait entrer dans une vie plus forte que la mort. Et cela est pour eux plus important que tout, car leur vie en est profondément renouvelée.

C’est tout cela qui s’exprime de mille manières dans l’art de nos églises et chapelles, et que nos guides de la SPREV ont permis, depuis 40 ans, à des milliers de personnes, de faire l’expérience. Il faut prier pour que le Seigneur donne aux guides présents et futurs la joie de transmettre par leur accueil dans ce patrimoine religieux en vie, ce beau message de l’Évangile. Un message vital pour tous et source de grande joie spirituelle. Amen.

† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon