Is 40, 1-5. 9-11 ; Ps 103 (104) ; Tt 2, 11-14 ; 3, 4-7 ; Lc 3, 15-16.21-22
Frères et Sœurs,
Comme je vous le disais au début de cette messe, le baptême que Jésus a inauguré dans les eaux du Jourdain fonde la catholicité de l’Église, c’est-à-dire cette universalité de la foi en Jésus que nous manifestons aujourd’hui en cette messe des nations et des familles. Dans une période de l’histoire marquée par les divisions, les conflits et les guerres, les lectures de ce jour nous montrent où est le chemin de la communion entre nous et avec Dieu. Nous en avons bien besoin !
Dans l’Évangile de ce jour, saint Luc nous dit que Jésus reçut le baptême de la main de Jean-Baptiste et qu’il reçut aussi l’Esprit Saint venant du ciel, donc de la main du Père. Il est évident que Jésus n’avait pas besoin de cela puisqu’il est « Dieu, né de Dieu, Lumière, né de la Lumière », comme nous le disons dans le Credo, mais s’il a reçu le baptême dans le Jourdain et le don du Saint-Esprit dans sa nature humaine, c’est bien pour que toute l’humanité passe par-là à sa suite, soit délivrée du mal et que chacun de nous puisse entendre la voix du Père venant du ciel lui dire : « Tu es mon fils, (tu es ma fille,) bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »
Le baptême et la Confirmation font donc de nous des fils et des filles bien-aimés du Père. Et par là aussi, nous devenons des frères et des sœurs du Christ. Quels que soient notre pays d’origine et notre culture, ce lien est plus fort que celui du sang. C’est Jésus qui le dit : « … celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. » (Cf Mt 12, 50)
Cela a du sens pour nous qui sommes rassemblés ici, originaires de divers continents, de divers pays. Nous qui avons été élevés dans des cultures très différentes, et pourtant qui sommes de la même famille grâce au don de Dieu. Au cœur de notre humanité qui est déchirée par de multiples tensions, cette messe des nations et des familles donne le magnifique témoignage que, malgré nos différences, Dieu nous unit en son Fils Jésus. Cela nous donne un avant-goût de ce que sera la vie avec Dieu pour toujours. Une vie vraiment fraternelle enrichie par nos différences.
Il est bon de nous rappeler ce lien divin qui nous unit pour nous aider à surmonter nos divisions. Il est normal qu’il y ait des différences entre nous : différences culturelles, sociales, mais aussi des différences de sensibilité religieuses, de convictions politiques. Les différences ne sont pas mauvaises en soi, au contraire, à condition qu’il y ait du respect, du dialogue, le souci du bien commun et toujours la recherche de la Vérité.
En ce début d’année 2022, et en cette fête du Baptême du Christ, j’aurais plusieurs vœux à formuler :
Premièrement : nous avons entendu à quel point le sacrement du baptême est vital dans notre vie personnelle et dans celle de nos familles. Comme saint Paul le dit dans la deuxième lecture de ce jour : « Par le bain du baptême, il nous a fait renaître et nous a renouvelés dans l’Esprit Saint. (…) afin que, rendus justes par sa grâce, nous devenions en espérance héritiers de la vie éternelle. » Il arrive souvent que des parents, baptisés eux-mêmes, ne souhaitent pas demander le baptême pour leur enfant, en disant : « Il choisira plus tard. » Cependant, si nous entendons bien ce que dit saint Paul, cela reviendrait à dire : « Il choisira plus tard d’entrer dans la famille de Dieu. Il choisira plus tard d’être héritier de la vie éternelle ! »
Dès notre plus tendre enfance, le baptême fait de nous des enfants bien-aimés du Père. Les parents n’attendent pas que leurs enfants soient des adultes pour leur manifester pleinement leur amour et leur donner les moyens de grandir ! Il est vrai que nous pouvons être baptisés à tout âge — chaque année, nous avons beaucoup de jeunes et adultes qui demandent le baptême – mais nous devons croire que, par le baptême, nous entrons dans une vie nouvelle avec le Christ, une vie qui n’aura pas de fin et qui transforme profondément notre vie familiale. Y a-t-il un cadeau plus beau que nous pouvons faire à nos enfants ? Même si, bien sûr, ils auront plus tard à s’engager librement à aimer le Christ et à le suivre !
Deuxièmement : Jésus a donc été baptisé, mais, aussitôt après, il a reçu l’Esprit Saint. Cet Esprit de Dieu que nous recevons en plénitude dans le sacrement de Confirmation. Depuis le tout début de l’Église, les apôtres ont imposé les mains aux nouveaux baptisés pour qu’ils reçoivent le don du Saint-Esprit. Or, aujourd’hui, beaucoup de fidèles ont été baptisés, mais n’ont jamais reçu la Confirmation pour différentes raisons.
Si je demandais maintenant à tous ceux qui n’ont jamais été confirmés de lever le doigt, je pense qu’il y en aurait beaucoup ! Or, là aussi, il s’agit bien du don de Dieu que Jésus a associé au baptême. Et s’il a inauguré le baptême « dans l’Esprit Saint et le feu », c’est que nous en avons besoin pour vivre avec Lui. Or, même si nous avons été baptisés il y a des années, il n’est jamais trop tard pour recevoir la Confirmation. N’hésitez pas à en faire la demande à votre paroisse ! Ce serait une belle occasion d’approfondir et de raviver la foi de votre baptême.
Enfin, nous avons vécu en Église une année éprouvante par les conséquences de la pandémie, mais aussi par les révélations des abus sexuels qui ont été commis par des clercs et des laïcs. L’Église que nous formons tous ensemble a sans cesse besoin de se convertir, car nous sommes pécheurs, nous le savons bien. Mais il y a aussi d’autres raisons de se convertir, comme notre réticence à annoncer la Bonne Nouvelle du Salut, nos peurs à témoigner ouvertement de notre foi. Des peurs qui peuvent engendrer aussi des replis sur nous-mêmes et un manque de générosité et d’engagement, notamment auprès de ceux qui souffrent alors que c’est une priorité pour chacun de nous et pour l’Église.
En cette nouvelle année de grâce qui commence, n’est-il pas vital de raviver la foi de notre baptême, notamment par le sacrement du pardon et de l’eucharistie ? Par le baptême que nous avons reçu, le Seigneur nous ouvre un chemin de vie, quelles que soient les circonstances heureuses ou malheureuses de l’existence humaine y compris l’épreuve que nous traversons avec la pandémie. En ravivant la grâce de notre baptême, le Seigneur nous unit dans une fraternité universelle qui n’est pas une œuvre humaine. C’est lui qui nous fait ainsi entrer ensemble dans une profonde communion avec Dieu, lui qui est source de paix, de joie et d’amour.
C’est ce que nous pouvons nous souhaiter de meilleur pour que cette nouvelle année soit vraiment sainte. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon