Rm 8, 18-25 ; Ps 125, 1-2ab, 2cd-3, 4-5 ; Lc 13, 18-21
Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement
Chers Amis,
Ce matin, nous avons évoqué le thème du jour qui est « Marie, modèle de chapelle à bâtir ». Cet après-midi, nous accueillons les textes du jour avec ce passage, assez lourd, de la LETTRE DE SAINT PAUL AUX ROMAINS. Lourd, parce qu’il évoque les souffrances du temps présent, et Dieu sait si ces souffrances résonnent en nous actuellement, mais en même temps, il apporte une très belle espérance.
Cette année, ce texte a une résonnance particulière notamment à la suite de la parution du rapport de la Commission SAUVÉ qui révèle que le péché n’est pas seulement en dehors de l’Église, mais, aussi, bien présent au cœur de celle-ci, car nous sommes tous pécheurs, là où, bien sûr, nous aurions aimé que tous soient parfaits. Saint Paul évoque le pouvoir du néant auquel la création a été livrée. C’est une expression forte. Comment ne pas penser à toutes les victimes évoquées par le travail de la Commission SAUVÉ dans l’Église, mais aussi dans toute la société, et qui n’ont pas encore fini d’être découvertes. Plus largement, j’ai envie d’étendre cela aux grands défis de notre temps : le réchauffement climatique et ses conséquences, la pollution, les guerres, le terrorisme. Si je les évoque, c’est parce que saint Paul parle de la création, de la création tout entière qui crie sa souffrance !
Saint Paul est à la fois très lucide sur les malheurs de son temps, et en même temps prophétique par rapport au temps qui est le nôtre aujourd’hui. Comme quoi, ce n’est pas d’hier que la création souffre. Cependant, saint Paul n’en reste pas à ce constat négatif. Il exprime aussi une très grande espérance en comparant notre création à la souffrance d’un accouchement (les mères de famille savent de quoi on parle) et donc à la joie annoncée d’une naissance. Une naissance à la vie que Dieu fait déjà jaillir au cœur de notre humanité meurtrie. Il rappelle que nous sommes déjà sauvés par le Christ. Nous le sommes en espérance, mais nous sommes également promis à la vie avec Dieu en étant libérés du mal. Il rappelle aussi que nous avons déjà commencé à recevoir l’Esprit Saint qui agit en nous et par nous, à condition que nous nous laissions conduire par lui ! Tout cela veut dire que malgré toutes les difficultés de ce monde, Dieu ne nous a pas abandonnés. Il agit au cœur de notre vie. Il agit en ce monde, et de bien des manières.
Dans l’Évangile, que nous avions déjà entendu ce matin, il y a deux paraboles sur le règne de Dieu. Ce règne, il n’est pas en dehors du monde. Il est bien, comme le dit Jésus, au milieu de nous. C’est pour cela que nous sommes en pèlerinage : parce que le règne de Dieu est au milieu de nous ! Le Seigneur est bien présent. Il nous invite à marcher avec Lui. Jésus vient même nous rejoindre sur le chemin, un peu comme les disciples d’Emmaüs qui marchaient en étant bien tristes et qui vont trouver avec Jésus une très grande joie et une force d’avancer et même d’annoncer la Bonne Nouvelle.
J’aimerais revenir un peu sur ces deux paraboles. D’abord la graine de moutarde qui devient un arbre, exprimant ainsi une croissance continue. Lorsque nous regardons, ne serait-ce que notre région, la Bretagne, nous pourrions nous désespérer en disant que l’Église n’a pas cessé de diminuer, et c’est peut-être davantage marquant pour les plus anciens. Mais ce n’est pas vrai. La place de l’Église dans la société par contre a pu changer, mais le règne de Dieu, lui, continue de se développer dans le monde. D’ailleurs, c’est assez étonnant dans le rapport de M. SAUVÉ, de lire dans ce document que s’ils ont déployé tant d’énergie pour travailler la question, c’est qu’ils croient que l’Église a une place très importante à tenir dans la société, un peu comme le levain dans la pâte. Le règne de Dieu est porté en partie par l’Église, mais ce n’est pas uniquement en son sein qu’il continue de grandir jusqu’à l’accouchement, qui est l’avènement glorieux du Christ à la fin des temps. Il grandit aussi dans le cœur de beaucoup d’hommes et de femmes.
Enfin, j’aimerais dire un mot sur ces oiseaux qui font leurs nids dans les branches. Je pense à nos familles (car nous avons voulu que ce pèlerinage soit familial aussi) ; ces familles qui ont tant à puiser dans le règne de Dieu que représente cet arbre qui se développe. Nous allons être particulièrement attentifs à ces familles dans la démarche synodale « Devenir chrétiens en famille » que nous avons initiée en septembre et qui va prendre son envol prochainement, et qui va nous inciter à être davantage attentifs à toutes les familles y compris celles qui ont des difficultés.
Frères et Sœurs, vivons pleinement ce pèlerinage en ouvrant notre cœur à tout ce dont le Seigneur veut nous combler. Nous savons que d’un pèlerinage, nous n’en repartons jamais comme nous sommes arrivés. Le Seigneur veut nous combler dans cette démarche que nous faisons. C’est à nous de l’accueillir, bien sûr, mais Il nous comble pour faire jaillir en nous la foi, l’espérance et la charité. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon