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29 décembre 2024 — Sainte Famille de Jésus, Marie, Joseph — Ouverture année jubilaire – Quimper

1 S 1, 20-22.24-28 ; Ps 83 ; 1 Jn 3, 1-2.21-24 ; Lc 2, 41-52

Frères et sœurs,

Le Pape vient donc d’ouvrir à Rome dans la nuit de Noël cette année jubilaire. Une année qui est célébrée tous les 25 ans. Cela fait 2025 ans que Jésus est né. Le Pape a souhaité qu’en dehors de Rome, cette ouverture soit célébrée ce dimanche, donc après l’ouverture à Rome ! Mais quel sens cela peut-il avoir de la célébrer en cette fête de la Sainte Famille ?

Cela marque le fait que Jésus, le Fils de Dieu, a assumé pleinement sa condition humaine et que c’est précisément dans sa famille qu’il a grandi « en sagesse, en taille et en grâce devant Dieu et devant les hommes » comme nous venons de l’entendre dans l’Évangile de ce jour. Sa vie familiale est un aspect essentiel du Mystère de l’Incarnation et il nous rejoint ainsi dans nos propres familles.

En ce dimanche un peu particulier, j’aimerais dans cette homélie reprendre dans la Bulle d’indiction du pape François quatre axes de cette année sainte qui commence par ces mots de saint Paul : « L’espérance ne déçoit pas ». Il n’a pas choisi ce thème au hasard ! Il est clair que la situation du monde actuel et le flot d’informations qui nous viennent du monde entier avec les guerres, les violences, les effets dévastateurs du changement climatique obscurcissent en nous les belles choses qui se font en ce monde. Avec le risque de perdre l’espérance et de nous démobiliser !

Le Pape nous invite donc à retrouver les sources de notre espérance, à en reconnaître les effets dans notre vie et à accueillir toutes les grâces que le Seigneur nous donne pour nous encourager à grandir dans cette espérance et à en témoigner. Et c’est pourquoi il rappelle que cette année jubilaire est « l’occasion de ranimer l’espérance. »,c’est cela que je veux développer dans cette homélie.

Alors, quelles sont les raisons de notre espérance ? Sur quoi se fonde-t-elle ?

D’abord, le Pape précise que «La Parole de Dieu nous aide à en trouver les raisons. »Pourquoi ?

Parce que cette Parole nous révèle le dessein de Dieu de sauver l’humanité. Et le Christ, en sa personne, est venu accomplir cette Parole et nous la révéler. C’est pourquoi Jésus est notre espérance. C’est pourquoi le Pape nous invite à « un moment de rencontre vivante et personnelle avec le Seigneur Jésus, “porte” du salut. » (n°1)

Et il développe largement cette conviction de foi : « L’espérance, en effet, naît de l’amour et se fonde sur l’amour qui jaillit du Cœur de Jésus transpercé sur la croix (…) Et sa vie se manifeste dans notre vie de foi qui commence avec le baptême, se développe dans la docilité à la grâce de Dieu, animée en conséquence par l’espérance toujours renouvelée et rendue inébranlable par l’action de l’Esprit Saint. » (n°3)

Comme je l’ai évoqué au début, « … trop souvent les hommes s’abîment dans le désespoir. Nous, en revanche, en vertu de l’espérance dans laquelle nous avons été sauvés, en regardant le temps qui passe, nous avons la certitude que l’histoire de l’humanité, et celle de chacun, ne se dirige pas vers une impasse ou un abîme obscur, mais qu’elle s’oriente vers la rencontre avec le Seigneur de gloire. » (n°19)

Mais qu’est-ce que l’espérance change dans notre vie quotidienne ? Quels en sont les effets concrets ?

C’est un deuxième aspect que le Pape développe justement : les effets de l’espérance dans notre vie et dans la vie du monde. Comme il le souligne : « … l’espérance ne cède pas devant les difficultés : elle est fondée sur la foi et nourrie par la charité. Elle permet ainsi d’avancer dans la vie. » (n°3)Il évoque donc là les trois vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité qui sont inséparables et constituent la colonne vertébrale de notre vie de disciples de Jésus. 

Et il développe un effet de l’espérance qui est très pertinent dans le monde d’aujourd’hui et qui peut avoir de grandes conséquences dans nos relations humaines, c’est la patience. Je le cite : « Dans un monde où la précipitation est devenue une constante, nous nous sommes habitués à vouloir tout et tout de suite. On n’a plus le temps de se rencontrer et souvent, même dans les familles, il devient difficile de se retrouver et de se parler calmement. La patience est mise à mal par la précipitation, causant de graves préjudices aux personnes. En effet, l’intolérance, la nervosité, parfois la violence gratuite surgissent, provoquant l’insatisfaction et la fermeture. » (…) « Si nous étions encore capables de regarder la création avec émerveillement, nous pourrions comprendre à quel point la patience est décisive. » nous dit le Pape et il ajoute : « La patience, qui est aussi le fruit de l’Esprit Saint, maintient vivante l’espérance et la consolide en tant que vertu et style de vie. Apprenons donc à souvent demander la grâce de la patience qui est fille de l’espérance et en même temps la soutient. » (n°4)

Un troisième aspect qui est à vivre dans cette année jubilaire, c’est la remise de dettes et le pardon. Traditionnellement, l’origine de ces années jubilaires concerne les dettes matérielles vis-à-vis d’autrui et le Pape demande d’ailleurs instamment aux instances internationales la remise des dettes des pays pauvres, mais il faut aussi entendre ces dettes dans nos relations humaines, c’est-à-dire nos différends, nos divisions. Il y a tant de divisions, entre voisins, mais aussi dans les familles à cause d’un héritage ou à des attitudes blessantes ou même des fautes graves commises par l’un ou l’autre membre. Des blessures qui restent au fond de nous-mêmes et qui empoisonnent nos liens familiaux ou de voisinage.

Les pèlerinages auxquels nous sommes invités cette année, notamment à Rome, mais il y en aura aussi dans le diocèse « seront des oasis de spiritualité (dit le Pape) où l’on pourra se rafraîchir sur le chemin de la foi et s’abreuver aux sources de l’espérance, avant tout en s’approchant du sacrement de la réconciliation, point de départ irremplaçable d’un véritable chemin de conversion. »Et le Pape ajoute que dans les diocèses, « … on veillera de manière spéciale à la préparation des prêtres et des fidèles aux confessions et à l’accessibilité du sacrement sous forme individuelle. » (n°5)

Enfin un quatrième aspect que le Pape souligne, c’est le témoignage. « Regarder l’avenir avec espérance, c’est aussi avoir une vision de la vie pleine d’enthousiasme à transmettre. Nous devons malheureusement constater avec tristesse que, dans de nombreuses situations, cette vision fait défaut. » (n°9)Le Pape souligne notamment la peur de certains jeunes couples de transmettre la vie, une peur que l’espérance permet de surmonter « car le désir des jeunes d’engendrer de nouveaux enfants comme fruit de la fécondité de leur amour donne son avenir à toute société. Ce désir est une question d’espérance puisqu’il dépend de l’espérance et produit l’espérance. » (n°9)

Que cette année jubilaire nous pousse aussi à « être des signes tangibles d’espérance pour de nombreux frères et sœurs qui vivent dans des conditions de détresse. » (n°10) Je ne développe pas, car nous avons en tête beaucoup de situations de personnes proches ou lointaines qui sont dans ce cas. 

Je vous invite à lire, et même à méditer en équipe ou en famille, l’intégralité de la Bulle d’indiction du Pape Spes non Confundit, l’espérance ne déçoit pas qui se termine par cet appel : « Laissons-nous dès aujourd’hui attirer par l’espérance et faisons en sorte qu’elle devienne contagieuse à travers nous, pour ceux qui la désirent. Puisse notre vie leur dire : “Espère le Seigneur, sois fort et prends courage ; espère le Seigneur” (Ps 27, 14). Puisse la force de l’espérance remplir notre présent, dans l’attente confiante du retour du Seigneur Jésus-Christ, à qui reviennent la louange et la gloire, maintenant et pour les siècles à venir. » (n°25) Amen.

† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon