Gn 2, 18-24 ; Ps 127 (128), 1-2, 3, 4-6 ; He 2, 9-11 ; Mc 10, 2-16
Frères et sœurs,
Lorsqu’on installe un Curé, on ne choisit pas les lectures. On accueille celles que la Liturgie nous offre ! Ces textes peuvent en effet nous étonner dans le contexte de cette installation, mais ils nous éclairent aussi sur un aspect du ministère du prêtre qui est justement de préparer et célébrer des mariages et d’accompagner des couples en difficulté.
Dans l’Évangile, les pharisiens veulent tendre un piège à Jésus sur la question du mariage et du divorce, car ils savent que c’est un sujet conflictuel. Déjà à l’époque ! Jésus ne tombe pas dans le piège du permis ou du défendu, il élève le débat en rappelant que Dieu est amour et qu’il est à l’origine de tout ce qui existe. Il est la source de l’amour qui se répand sur la terre, notamment de l’amour qui unit l’homme et la femme dans le mariage.
Jésus rappelle ici que c’est Dieu qui unit les époux. Un message à entendre pour les jeunes couples qui ne pensent pas utile de recevoir ce sacrement alors que Dieu les aime et veut consacrer leur projet de vie !
Un message à entendre pour tous les couples mariés qui s’efforcent de faire fructifier l’amour de Dieu dans leur vie conjugale et familiale et qui ont besoin d’être soutenus.
Mais c’est aussi un message qui fait souffrir les couples qui se sont séparés, pour des raisons fort diverses d’ailleurs. Les unions qui ont échoué très vite, car les conditions n’étaient pas réunies et dont l’Église peut reconnaître la nullité. Ceux qui ont vécu des épreuves, ou qui ont été rejetés par leur conjoint. Tous ceux pour lesquels la séparation est devenue irréversible.
Dans tous les cas, Jésus a donné aussi des paroles d’espérance dans l’Évangile ! Je pense par exemple à l’eau vive de son amour, c’est-à-dire son Esprit Saint, qu’il promet à la Samaritaine qui a eu cinq maris et qui vit avec un homme qui n’est pas son mari (cf. Jn 4, 10). Cette femme est devenue pourtant témoin du Christ pour les gens de son village. Comme quoi la miséricorde du Seigneur peut se manifester d’une manière ou d’une autre, même dans les parcours de vie qui ont connu des échecs. Le pape François nous appelle justement à accueillir, à accompagner et à intégrer toutes les situations, car Jésus a dit : « Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » (Mc 2, 17)
Nous avons tous besoin d’être sauvés, et c’est justement pour cela que le prêtre a reçu du Seigneur cette responsabilité de conduire le peuple que le Christ lui a confié et d’agir en son nom. « Sois le berger de mes brebis », dit Jésus à Pierre. C’est bien cette image du bon berger qui marque le ministère « pastoral » du prêtre.
Cette responsabilité se manifeste concrètement selon les trois tâches traditionnelles : annoncer la Bonne Nouvelle, sanctifier et gouverner le peuple de Dieu. Sans les détailler, j’aimerais souligner quelques défis importants liés au contexte qui est le nôtre aujourd’hui.
La première des trois charges est celle d’annoncer l’Évangile qui recouvre beaucoup de réalités : la prédication, les enseignements, mais aussi la catéchèse des jeunes et des adultes. Mais le grand défi actuel est l’accueil et l’accompagnement des personnes qui demandent un sacrement, mais qui n’ont pas, ou peu, de formation chrétienne. Ils sont de plus en plus nombreux dans une société qui s’est sécularisée depuis quelques décennies. C’est l’enjeu des Orientations diocésaines de 2025 que vous allez travailler en paroisse prochainement.
Je souligne également l’annonce de l’Évangile dans les établissements scolaires catholiques qui sont devenus de vraies terres de mission, car beaucoup de parents qui y mettent leurs enfants n’ont jamais eu de formation chrétienne, mais ils sont plus nombreux à s’y intéresser. Il en est souvent de même pour les enseignants.
Cela nécessite l’engagement de beaucoup de fidèles pour les accompagner sur le chemin de la foi. Chacun doit se sentir concerné. Un des moyens que nous sommes en train de relancer, ce sont les petites fraternités chrétiennes locales qui nous aident à être de vrais disciples-missionnaires qui vont être lancées en novembre dans votre paroisse. Tous les baptisés devraient s’engager dans de telles communautés de six ou sept personnes, où l’on prie, où l’on médite la Parole de Dieu et où l’on se soutient mutuellement. Ce sont des lieux de proximité où des néophytes et des personnes en recherche peuvent aussi se joindre et cheminer avec le soutien des autres. Votre curé aura l’occasion de vous en parler puisque nous venons de distribuer les livrets de présentation.
La deuxième charge du Curé, et des autres prêtres et diacre avec lui, c’est de sanctifier le peuple qui lui est confié notamment en soutenant une vie de prière personnelle et communautaire, et en célébrant les sacrements. C’est par la liturgie que nous entrons dans le mystère du Salut en recevant les sacrements. C’est pourquoi la liturgie est un vrai lieu de sanctification du peuple chrétien. Le curé est responsable de la liturgie et doit faire en sorte qu’elle soit bien célébrée, en respectant ce que demande l’Église. Je souligne qu’une belle liturgie, dignement célébrée, rassemble la communauté au-delà des sensibilités.
C’est l’une des missions difficiles du curé qui est celle de renforcer la communion de l’Église en encourageant les fidèles à mettre le Christ au cœur de leur vie et en sachant surmonter les divergences de point de vue, tant sur les questions liturgiques, que sociales ou politiques. C’est un grand défi actuellement pour toute l’Église dans une société qui est profondément fracturée. Et chacun de nous doit y contribuer en se faisant artisan de la communion, en faisant tout pour éviter les divisions qui minent l’Église et qui altèrent le témoignage que le Seigneur attend de nous.
Cela rejoint la troisième charge, qui est celle de gouverner, c’est-à-dire de conduire le peuple de Dieu à la suite du Christ. Lui qui est « le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6). Les prêtres doivent assumer cette charge avec humilité à la manière du Christ qui s’est fait le serviteur en lavant les pieds de ses disciples, en accueillant les pécheurs et ceux qui étaient rejetés, en se faisant proche des malades et des personnes éprouvées. Le Curé prend soin de son peuple, comme l’évoque l’étymologie du mot Curé. Il prend soin des âmes !
Ces trois charges, le Curé ne peut pas les porter tout seul bien évidemment. Il les met en œuvre avec le Père Sébastien DAVY et d’autres prêtres, mais aussi avec la collaboration du diacre, des laïques en mission, de l’équipe d’animation pastorale, du Conseil économique et des nombreux fidèles qui sont engagés d’une manière ou d’une autre dans la paroisse, sans oublier ceux qui agissent auprès des familles qui vivent dans la précarité.
Frères et sœurs,
Comme je le soulignais au début, la charge de curé n’est pas d’abord administrative, c’est un don de Dieu qui suppose un engagement et un acte de foi du curé. Engagement que le Père François CALVEZ va exprimer par la profession de foi et le renouvellement des promesses de son ordination. Priez pour lui et les prêtres que le Seigneur vous donne et soutenez-les fraternellement dans leur charge. Priez aussi pour que de nouvelles vocations naissent parmi les jeunes comme celle de Benjamin POPIEUL, qui était fidèle de cette paroisse et que j’ai appelé comme candidat au sacerdoce il y a deux semaines.
L’Esprit Saint est à l’œuvre, frères et sœurs. Sachons accueillir ses dons et nous laisser conduire par lui. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon