Is 50, 5-9a ; Ps 114 (116a) ; Jc 2, 14-18 ; Mc 8, 27-35 (textes du 24e TO — B)
Frères et sœurs,
Pour cette ordination diaconale de Nicolas POULAIN, nous avons gardé les textes de la liturgie de ce dimanche. Ils nous éclairent sur certains aspects de ce ministère que je souhaite développer dans cette homélie.
D’abord, l’apôtre saint Jacques, dans la 2e lecture, exprime de façon vigoureuse que, si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, cela ne sert à rien. C’est une parole qui nous interpelle ! Et pour saint Jacques, les œuvres sont déjà de donner ce qu’il faut à ceux qui manquent du nécessaire. L’Église a compris cela dès l’origine comme on le lit dans les Actes des Apôtres lorsque la communauté naissante a institué des diacres pour seconder les apôtres afin d’assurer justement le service des tables, c’est-à-dire de venir en aide aux plus pauvres.
Mais dès le début de l’Église, le ministère des diacres Étienne et Philippe montrait que le don de la Parole de Dieu ne pouvait pas être séparé de la charité. Le ministère de diacre a évolué au cours des siècles, mais on y retrouve toujours cette intuition première, puisque le diacre est ordonné au service de l’Évêque et des prêtres dans le ministère de la Parole, de l’autel et de la charité, en se montrant le serviteur de tous.
Le diacre proclame l’Évangile et assure la prédication qui est un aspect essentiel de tous les ministres ordonnés. Il prépare le sacrifice eucharistique et va porter la communion aux fidèles présents, comme aux malades. Il célèbre les baptêmes et bénit les mariages. Il préside les funérailles et porte le viatique aux mourants.
Cher Nicolas, tu as pu commencer à expérimenter cela en exerçant les ministères de Lecteur et d’Acolyte, mais par l’imposition des mains transmise par les apôtres, tu vas entrer dans l’ordre des diacres et ainsi me seconder et seconder les prêtres. J’aimerais développer trois aspects dans cette homélie : la réponse à l’appel que Dieu et l’engagement dans le célibat pour le Royaume ; la mission diaconale auprès des plus pauvres et enfin l’annonce de la Bonne Nouvelle au plus grand nombre qui reste un grand défi pour notre temps.
Premier point, le prophète Isaïe nous dit : « Le Seigneur mon Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. » Comment ne pas penser à l’appel que tu entendais au fond de ton cœur alors même que tu avais engagé ta vie autrement dans des études et ton métier d’ingénieur ? Un métier que tu as exercé plusieurs années avec des responsabilités importantes. Cette réponse était donc d’autant plus difficile à donner.
Il est clair que la réponse à cet appel a été pour toi un vrai sacrifice, un don de toi-même au Seigneur et à l’Église. Mais tu ne t’es pas dérobé, comme dit Isaïe, et tu as expérimenté la joie spirituelle dont te comble le Seigneur en retour. Le Seigneur continue d’appeler des jeunes à le suivre pour devenir prêtres en son nom. Il y en a sûrement dans cette assemblée. Ton témoignage leur montre que lorsqu’on ressent intérieurement cet appel, il ne faut pas hésiter à vivre des renoncements pour suivre le Christ, car comme le promet Jésus : « Celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile, la sauvera. »
Ce don de toi-même, tu l’as manifesté tout à l’heure en acceptant de t’engager dans le célibat pour le Royaume. Il est le signe magnifique de ton amour pour le Christ au point de ne plus vivre que pour lui et pour les missions qu’il te confiera. Il exprime aussi une vraie charité pastorale pour les hommes et les femmes, les familles, que tu accompagnes dans leur vie de foi. Il est source de grande fécondité pour l’Église.
Ce célibat reste difficile à comprendre pour ceux qui ne sont pas eux-mêmes appelés par le Seigneur. Jésus l’avait bien annoncé en disant « comprenne qui pourra » ! Pourtant beaucoup sont reconnaissants de constater que nous sommes totalement à leur disposition au nom du Christ et par amour pour Lui. Bien sûr, cet engagement est exigeant et parfois dur à porter, mais comme le dit le prophète Isaïe : « Le Seigneur mon Dieu vient à mon secours » et, de fait, c’est bien grâce au don de l’Esprit Saint et à la fidélité dans les charges qui te seront confiées, que tu trouveras une vraie joie de vivre. Une joie spirituelle bien plus forte que les épreuves, car le ministère ordonné est aussi très gratifiant. Et il y a aussi le soutien de la fraternité entre prêtres, et les nombreuses amitiés qui se développent dans nos missions successives. Le prêtre ne souffre pas du manque de relations, au contraire, il a besoin parfois de silence et de solitude !
Un deuxième aspect de ton ministère diaconal, c’est le service des plus pauvres. Les plus pauvres n’étant pas seulement ceux qui manquent du nécessaire. Les pauvretés sont diverses, il y a le handicap, la solitude, le grand âge et tout ce qui peut isoler les personnes. Dans ton ministère diaconal, tu t’efforceras de permettre à toutes ces personnes de grandir dans la foi et de trouver pleinement leur place dans une vie d’Église accueillante et fraternelle.
Tu as eu l’occasion d’expérimenter de bien des manières cette proximité avec les plus pauvres, dans les maraudes, à la Cité Saint-Pierre à Lourdes, dans une maison de retraite, au sein d’un service de soins palliatifs, et encore cet été lors de la première retraite spirituelle proposée aux personnes en précarité à l’abbaye de Landévennec. L’équipe diocésaine « Place et Parole de Pauvres » a permis à l’Église diocésaine de cheminer depuis quelques années afin que nous mettions en œuvre dans les paroisses tout ce qui peut permettre aux plus pauvres de n’être pas seulement des assistés, mais des assistants qui contribuent à leur manière, à la croissance du Royaume de Dieu.
Un dernier point qui est aussi essentiel dans le ministère c’est de nourrir les foules par l’annonce de la Bonne Nouvelle. Tu as déjà enseigné, tu vas maintenant assurer la prédication dans la liturgie. Tu sais bien que cela nécessite de ta part une réelle et quotidienne proximité avec la Parole de Dieu et une vie humble et irréprochable. Tu n’as pas attendu pour la vivre ! La prédication doit être incarnée, c’est pourquoi je vais te demander dans quelques instants, de garder le mystère de la foi dans une conscience pure, et proclamer cette foi par la parole et par les actes.
En devenant diacre, le don de l’Esprit Saint ne va pas effacer ton humanité. Tu as des limites comme tout le monde, tu les connais, mais en les reconnaissant avec humilité, tu permets à la Puissance de Dieu de se manifester pleinement dans ta vie. Ce don de Dieu est définitif. L’ordination diaconale ne s’efface pas. Et même si, comme nous l’espérons, tu pourras être ordonné prêtre, la dimension diaconale de ton ministère demeurera.
Frères et sœurs, préparons-nous tous maintenant en silence à accueillir l’Esprit Saint qui va se manifester pleinement dans la vie de Nicolas par le sacrement de l’ordre que nous allons célébrer dans quelques instants.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon