Le mercredi 15 mai 2024, de 9 h à 16 h 30, s’est tenue une journée de conférences au Juvénat Notre-Dame à Châteaulin, organisée par le service de la pastorale de la santé pour éclairer le public sur le projet de loi concernant la fin de vie. Cet événement a permis de débattre des questions éthiques et sociétales liées à la fin de vie, aux soins palliatifs, au suicide assisté, et à l’euthanasie.
Parmi les intervenants, le Dr Cyril Hazif-Thomas, médecin psychiatre au CHRU de Brest et directeur de l’espace éthique de Bretagne, a pris la parole pour partager son expertise et son expérience. « Je travaille beaucoup sur les questions éthiques sociétales, mais aussi les dilemmes éthiques des soignants », a-t-il déclaré en préambule. Il a insisté sur l’importance de permettre aux chrétiens de réfléchir et de donner leur avis sur des questions aussi intimes que la fin de vie et la mort. Le Dr Hazif-Thomas a évoqué les évolutions sociétales et personnelles face à la mort, en soulignant les différentes phases que la société a traversées depuis la canicule de 2003 jusqu’à la crise sanitaire récente, et maintenant avec le débat sur l’aide active à mourir. « Aujourd’hui, nous voyons avec l’aide active à mourir une autre figure du rapport à la mort qui serait celui d’une maîtrise plus avancée sur le point final de notre vie. »
Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes et responsable du groupe bioéthique de la Conférence des évêques de France, a également apporté son éclairage. Fort de plus de dix ans de travail sur la fin de vie, il a exprimé ses préoccupations concernant le projet de loi du Président Macron, qui sera débattu à l’Assemblée nationale à partir du 27 mai. « Il y a eu plusieurs propositions de loi sur le sujet et à chaque fois, j’y ai participé d’une certaine manière en réfléchissant sur le sujet et en participant à des auditions que des parlementaires voulaient bien faire », a-t-il expliqué. Mgr d’Ornellas a rappelé l’importance de la dignité humaine et le besoin crucial de développer les soins palliatifs en France, avant d’introduire des législations sur l’euthanasie ou le suicide assisté. « On n’a pas encore évalué, il n’y a eu aucune évaluation en France de la loi Claeys-Leonetti et sur la pratique de la sédation continue et profonde maintenue jusqu’au décès. »
Les conférences ont permis d’aborder en profondeur les enjeux du projet de loi, dévoilé par le Président de la République, qui prévoit de nouvelles mesures pour l’accompagnement des malades en fin de vie. Les discussions ont mis en lumière les réserves des représentants des cultes, notamment celles de la Conférence des évêques de France, qui ont réitéré leur opposition au projet, mettant en avant le manque de développement des soins palliatifs dans le pays. « Il y a 21 départements qui n’ont pas de soins palliatifs en France, un tiers des EHPAD n’ont pas de compétences en soins palliatifs », a souligné Mgr d’Ornellas.
Dr Hazif-Thomas a insisté sur le besoin de diffusion de la culture palliative parmi les citoyens. « Chaque citoyen doit s’en saisir aujourd’hui », a-t-il affirmé. Il a également partagé ses observations sur l’évolution des attitudes face à la mort, en notant un changement significatif depuis la canicule de 2003 et la récente crise sanitaire. « Aujourd’hui, nous voyons avec l’aide active à mourir une autre figure du rapport à la mort qui serait celui d’une maîtrise plus avancée sur le point final de notre vie. »
Mgr d’Ornellas a critiqué la précipitation du projet de loi, arguant qu’il est mal conçu et inadapté sans une évaluation préalable des lois existantes, notamment la loi Claeys-Leonetti sur la sédation continue et profonde. Il a souligné l’importance de renforcer les soins palliatifs pour assurer un accompagnement digne et sans souffrance des personnes en fin de vie. « Il y a quelque chose d’incompréhensible, peut-être d’idéologique, qui ne correspond pas à la réalité du terrain », a-t-il déclaré.
Cette journée de réflexion a été une opportunité précieuse pour les participants de se pencher sur les aspects éthiques et humains de la fin de vie, de confronter des points de vue diversifiés et d’enrichir le débat public. En mettant en avant les témoignages et les expériences, cette rencontre a permis de souligner la nécessité d’une approche équilibrée et réfléchie face à une question aussi cruciale que celle de la fin de vie.
Mgr d’Ornellas a conclu en rappelant l’importance de la compassion et du soin envers les personnes en fin de vie, citant l’exemple du Bon Samaritain. « Il me semble que ce projet de loi qui légalise l’euthanasie et le suicide assisté, c’est une régression. On ne fait pas confiance dans ce savoir-faire et on ne le promeut pas », a-t-il affirmé.
Dr Hazif-Thomas, quant à lui, a réitéré l’importance de la réflexion éthique collective. « Les questions éthiques ne sont pas l’apanage des seuls médecins ou des seuls scientifiques. C’est vraiment quelque chose qui doit diffuser en termes de culture », a-t-il conclu.