Jr 7, 1-7 ; Ps 99 ; Jn 10, 1-10 ;
Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement
Frères et sœurs,
Pourquoi franchir une porte jubilaire ? En quoi cette porte est-elle sainte ?
Nous l’avons compris, c’est un geste symbolique. Nous pouvons entrer dans la basilique par une autre porte, mais ce n’est pas pareil ! C’est symbolique, mais plus que cela encore, c’est liturgique : c’est-à-dire que la grâce de Dieu s’y manifeste. Le risque serait que le passage par la porte sainte ne soit que formel et symbolique. C’est en fait un geste liturgique qui nous engage. Comme nous le dit Jérémie dans la première lecture : « Écoutez la parole du Seigneur (…) vous qui entrez par ces portes pour vous prosterner devant le Seigneur. » Le prophète est clair : on ne peut entrer par cette porte sainte sans conversion. Il ajoute : « Si vraiment vous rendez meilleurs vos chemins et vos actes, si vraiment vous maintenez le droit entre un homme et son prochain. » Il invite clairement à renoncer au mal, à l’injustice, à l’infidélité vis-à-vis de Dieu et du prochain. La porte jubilaire symbolise le passage du péché vers la grâce, du retour vers Dieu.
En 2018, le pape François a promulgué l’encyclique Gaudete et Exultate sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel. Il écrivait : « Le Seigneur demande tout ; et ce qu’il offre est la vraie vie, le bonheur pour lequel nous avons été créés. Il veut que nous soyons saints et il n’attend pas de nous que nous nous contentions d’une existence médiocre, édulcorée, sans consistance » Il prolonge : « En effet, le Seigneur a élu chacun d’entre nous pour que nous soyons saints et immaculés en sa présence, dans l’amour. » (Ep 1,4)
Cette année jubilaire est une magnifique occasion de faire un pas de plus sur ce chemin de notre vie chrétienne, ce chemin de sainteté. Nous le faisons en communion de prière avec les milliers de pèlerins qui sont venus ici durant 600 ans, présentant au Seigneur leurs peines et leurs joies. Beaucoup prient pour nous maintenant. Nous le faisons dans l’humilité en nous inspirant de la simplicité et de la foi confiante de Salaün ar Fol. Il nous montre le chemin ! Dans notre monde, marqué, actuellement par les tensions nationales et internationales, nous avons besoin de nous rapprocher, humblement, du Seigneur, lui qui a vaincu la mort et qui se présente, dans l’Évangile que je viens de lire, à la fois comme le Pasteur et comme la porte.
Cela peut paraître un peu curieux, d’ailleurs, cette double image qui semble apparemment incohérente. Jésus est-il le Pasteur ou la porte ? Il est les deux. Ce sont des images complémentaires pour nous éclairer sur ce que nous voulons recevoir comme grâces en passant cette porte du Jubilé.
Je veux souligner trois choses.
La première, Jésus se présente d’abord comme le Pasteur. Le vrai Pasteur. Le bon Pasteur. Il nous appelle chacun par notre nom « Je connais mes brebis et elles me connaissent. » (Jn 10, 14) Il y a comme un lien affectif qui nous unit à Jésus. Il nous aime et prend soin de nous. Il guérit les cœurs brisés. Je trouve d’ailleurs magnifiques toutes les prières qui peuvent être écrites sur le livre de cette basilique, et qui expriment justement cette foi dans le Christ qui nous aime et qui prend soin de nous. Il continue à le faire par les sacrements qui sont célébrés ici, de nombreuses personnes trouvent dans cette église un prêtre pour leur donner le pardon en son nom. C’est, me semble-t-il, une grâce importante de ce sanctuaire.
L’année jubilaire est l’occasion de renouer avec le sacrement de pénitence et de réconciliation, de découvrir ou de redécouvrir toute la grâce que le Seigneur accorde dans ce sacrement. D’ailleurs, la démarche jubilaire comprend toujours, non seulement le passage par la porte sainte, mais aussi le sacrement du pardon et celui de l’eucharistie. En plus de la démarche du pèlerinage qui en soi est une source de grâces.
Deuxièmement, Jésus nous dit aussi que le bon pasteur les fait sortir et « il marche à leur tête ». Jésus nous conduit par sa Parole de vie, lue, méditée et commentée. Il nous conduit aussi par les prêtres qui nous guident en son nom. L’année jubilaire doit être l’occasion de méditer davantage la Parole de Dieu. Que ce soit seul à la maison, ou avec d’autres, et de renforcer notre communion ecclésiale autour de nos prêtres. Et justement, j’aurai la joie, en cette année jubilaire de Notre-Dame du Folgoët, d’ordonner prêtre Jean NIELLY, ici présent, le 25 juin prochain. Un beau signe que le Seigneur nous donne. Un appel à prier pour les vocations sacerdotales et religieuses à la veille de la Journée mondiale qui est dédiée à cette cause.
Enfin, troisièmement, Jésus se présente aussi comme la porte : « Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage. » La porte sainte est donc le signe de la conversion, mais elle est aussi le signe du Salut que nous trouvons en Jésus Christ. Le fait de souligner que nous pouvons entrer et sortir exprime bien la liberté intérieure des enfants de Dieu, de ceux qui se laissent conduire par l’Esprit Saint en étant délivrés de toutes les formes de tentation, délivrés du mal.
C’est un appel à ne pas nous laisser corrompre par l’esprit mauvais, mais à enraciner notre vie dans l’Évangile et dans l’amitié avec le Christ. Autrement dit, de nous laisser conduire par l’Esprit Saint et pas par les idéologies du moment. La porte jubilaire représente donc aussi notre profonde communion avec le Christ, et la Vierge Marie est toujours là pour favoriser ce lien. Dans ce sanctuaire, c’est bien en invoquant la Vierge Marie que nous pouvons davantage aimer le Christ et le mettre au cœur de notre vie.
Frères et sœurs, que cette année jubilaire soit pour chacun de nous, mais aussi pour votre paroisse et le diocèse, une belle occasion pour entrer par la porte du Christ, lui qui est venu pour que nous ayons la vie, la vie en abondance. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon