Ac 12, 24 – 13, 5 ; Ps 66 (67) ; Jn 12, 44-50 (textes du mercredi de la 4e semaine de Pâques)
Chers Amis,
Chers Auditeurs de la radio RCF,
Au premier abord, la vie de Charles de FOUCAULD peut paraître très éloignée de nos préoccupations ! Il a eu dans sa jeunesse une adolescence pas vraiment exemplaire, il a été officier, mais avec une carrière très mouvementée. Il a été moine, puis ermite, puis prêtre en mission en Algérie. Rien de commun avec ce que nous vivons ! Pourtant, plusieurs aspects de sa vie peuvent nous inspirer.
D’abord, il a été éduqué chrétiennement, mais il a perdu la foi à 15 ans, à une époque où il fréquentait un club de philosophie. Son approche de la foi était devenue trop intellectuelle. Il est devenu totalement indifférent, et comme il avait beaucoup d’argent, il organisait des fêtes pour ses amis avec l’alcool, les filles. Aujourd’hui, il y aurait eu aussi la drogue, mais cela n’existait pas à l’époque ! Il dira plus tard : « Vous ne pouviez pas entrer, mon Dieu, dans une âme où le démon et les passions immondes régnaient en maître ».
Cela rejoint la parole du Christ dans l’Évangile de ce jour : « Moi qui suis la lumière, je suis venu dans le monde pour que celui qui croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres. » Et, de fait, il était… dans les ténèbres ! Il restera tout de même 14 ans dans un état d’incroyance jusqu’à ses 28 ans. Cela rejoint beaucoup de jeunes aujourd’hui et d’adultes, qui ne sont pas forcément dans l’athéisme militant, ce qui n’était d’ailleurs pas le cas de Charles de FOUCAULD, mais plutôt dans l’indifférence par rapport à la religion et dans une vie sans repères solides.
Cependant, son indifférence va être tout de même… bouillonnante. Il s’interroge, il cherche, et puis il mûrit aussi avec l’âge ! Son expédition scientifique au Maroc fait partie de cette évolution. Expédition périlleuse puisque le Maroc était interdit aux Occidentaux, sous peine de mort. Il sera décoré pour ce travail de la médaille d’or de la Société de Géographie de Paris. C’est justement au Maroc qu’il va commencer un chemin de conversion, et cela au contact des musulmans. Il écrira plus tard : « La vue de cette foi des musulmans, de ces âmes vivant dans la continuelle présence de Dieu, m’a fait entrevoir quelque chose de plus grand et de plus vrai que les occupations mondaines ».
Mais, il n’est pas comblé et il va continuer son chemin qui le conduira à la Croix de Jésus. Ce qui va lui apporter la lumière, c’est le témoignage de sa cousine Marie de BONDY, qu’il va retrouver à Paris, une chrétienne qui avait une foi très profonde, une foi qui s’exprimait dans sa manière de vivre, et puis l’Abbé HUVELIN, Vicaire de la paroisse Saint-Augustin à Paris, qu’il a rencontré grâce à sa cousine et qui va commencer à répondre à ces questions.
Cela rejoint notre cheminement dans la foi, qui passe par la rencontre de personnes croyantes qui témoignent de la foi qui les habite. Le pape François, qui cite d’ailleurs le pape Benoît XVI dit que « l’Église ne grandit pas par prosélytisme, mais par attraction. » De fait, Marie de BONDY et l’Abbé HUVELIN ont su, par leur témoignage, permettre au Seigneur d’attirer Charles de FOUCAULD vers la lumière. Il commençait à aller à l’église tout seul et faisait cette étrange prière : « Si vous existez, faites que je vous connaisse ». Sans s’en rendre compte, il commençait à entrer en relation avec Dieu !
De cette longue période d’incroyance, mais aussi de chemin vers le Christ, voici ce qu’il en dira en se comparant au fils prodigue de la parabole : « Ô Dieu de bonté qui n’aviez cessé d’agir depuis ma naissance en moi et autour de moi pour amener ce moment, avec quelle tendresse accourant aussitôt vous tombâtes sur mon cou pour m’embrasser, avec quel empressement vous me redonniez la tunique d’innocence ».
De fait, fin octobre 1886, il va retrouver complètement la foi au cours d’une rencontre avec l’Abbé HUVELIN. On peut parler d’une illumination soudaine comme cela peut arriver, mais après un long chemin de recherche tout de même ! L’Abbé HUVELIN lui demandera de se mettre à genoux pour recevoir le pardon du Seigneur, puis il va communier. De cette conversion il dira plus tard : « Aussitôt que je crus qu’il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvais faire autrement que de ne vivre que pour lui : ma vocation religieuse date de la même heure que ma foi : Dieu est si grand ! Il y a une telle différence entre Dieu et tout ce qui n’est pas Lui ».
On peut donc dire que Charles de FOUCAULD est un « recommençant ». C’est-à-dire de ceux qui ont été baptisés, mais qui ont laissé tomber leur vie chrétienne pendant des années, avant de retrouver le chemin du Seigneur. Il rejoint ainsi tous les « recommençants » d’aujourd’hui. Je pense notamment aux nombreux adultes qui vont être confirmés dans les semaines qui viennent.
Charles de FOUCAULD veut donc donner toute sa vie au Seigneur, mais il va chercher encore pendant 15 ans avant d’accepter finalement de devenir prêtre pour apporter non seulement l’Évangile, mais aussi le Corps du Christ en célébrant la messe pour ceux qui en sont le plus éloignés. Ce sera finalement l’Afrique du Nord, qu’il connaissait bien, et où il ira vivre sa vie de prêtre pour ceux qui lui paraissaient les plus éloignés de Jésus.
Cette recherche de sa vocation me fait penser à ce que vous pouvez vivre, vous les jeunes, dans votre recherche pour savoir ce que vous voulez faire plus tard. À votre âge, c’est plutôt quelle filière vous allez prendre, pour quelles études et pour quel métier ? Mais vous pouvez en même temps vous poser la question de savoir ce que vous allez faire de votre vie, en fondant une famille ou en donnant votre vie à Dieu dans une vocation religieuse ou sacerdotale pour servir l’Église et pour servir les autres !
Dans sa recherche de vocation, Charles de FOUCAULD n’a pas été à tâtons, il a beaucoup prié, il a médité l’Évangile et a cherché à savoir ce que le Seigneur attendait de lui. Il s’est fait conseiller par l’Abbé HUVELIN, et par lui, et par d’autres, il s’est surtout laissé conduire par l’Esprit Saint comme Paul et Barnabé dans la première lecture de ce jour. Vous aussi, n’hésitez pas à confier votre avenir entre les mains du Seigneur dans la prière. Dieu sait mieux que nous ce qui peut nous rendre vraiment heureux dans l’existence. Son Esprit Saint nous conseille.
Enfin, Charles de FOUCAULD a cherché à devenir le frère universel. Dans une lettre à sa cousine Marie de BONDY, il écrit : « Je veux habituer tous les habitants, chrétiens, musulmans, et juifs et idolâtres à me regarder comme leur frère –le frère universel… ». Cela ne l’empêchait pas d’avoir des amis proches, mais il a aussi essayé, comme Jésus, de se faire, le prochain de tous ceux qu’il rencontrait. Cette fraternité est un défi pour nous actuellement. Je pense aux violences qui se manifestent un peu partout, aux harcèlements, aux paroles blessantes, notamment sur les réseaux sociaux.
Au lycée Charles de FOUCAULD, je compte sur vous, les jeunes, avec toute votre foi et votre générosité, pour changer les mentalités et pour faire advenir cette fraternité universelle, si chère à Charles de FOUCAULD, au sein de votre établissement. Vous pouvez compter sur l’Esprit Saint qui vous guidera et vous soutiendra ! Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon