Du 5 au 8 avril 2022, les évêques de France se retrouvent pour une session de travail et de réflexion commune.
Retrouvez, ici, le programme, les déclarations et les interventions des évêques de France réunis en Assemblée plénière.
par Mgr Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et président de la Conférence des évêques de France Lourdes – Mardi 05 avril 2022 -Matin Chers Frères évêques et administrateurs…
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par Mgr Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et président de la Conférence des évêques de France
Lourdes – Mardi 05 avril 2022 -Matin
Chers Frères évêques et administrateurs apostoliques et diocésains,
Chers frères et sœurs invités des diocèses de France,
Chers Membres du secrétariat général
Chères directrices et chers directeurs des services nationaux,
Nous nous retrouvons donc ce matin à Lourdes pour l’Assemblée plénière de printemps des évêques de France. Nous sommes heureux de pouvoir le faire, même s’il nous faut encore conserver quelque prudence sanitaire, si nous voulons être sûrs de célébrer sans inquiétude la Semaine sainte qui vient.
Nous nous retrouvons dans une atmosphère bien différente de celle du mois de novembre dernier. Nous y avons vécu des heures intenses, nous y avons accompli un pas spirituel historique. L’enfant qui pleure accroché à la façade de notre hémicycle nous a rappelé, s’il en était besoin, alors que nous retrouvions ces lieux, la souffrance des personnes dont des prêtres ont abusé de la confiance et à qui ils ont infligé des traumatismes intérieurs durables. La journée de prière pour les personnes victimes d’agression sexuelle dans l’Église qui a été célébrée en France pour la première fois le troisième dimanche de Carême a permis à beaucoup d’entre nous de mener avec les prêtres et les fidèles de leur diocèse un temps de conversion, de reconnaissance, de demande de pardon à Dieu et aux personnes victimes, de vérité et de justice. Nous ferons le point sur la mise en œuvre des mesures que nous avons prises en novembre.
En ce premier jour et demi, nous voulons conclure trois années de travail consacré aux conversions qu’appelle la crise écologique dans laquelle notre humanité est engagée. En juillet 2019, le conseil permanent nouvellement élu s’était demandé quelle trace notre époque laisserait dans l’histoire. Avec la mise au jour de l’ampleur terrible des abus, la prise de conscience des limites de notre terre et de la dégradation de la « maison commune » du fait de l’enfermement de l’humanité dans un paradigme technico-économique a paru être le fait déterminant. Le Pape François, dans son encyclique Laudato Sí publiée en juillet 2015, avait fait entendre une voix forte et originale qui a ouvert une compréhension spirituelle profonde de cette crise. L’encyclique unit formidablement question écologique et question sociale, elle fait des enjeux écologiques des enjeux de justice et de fraternité entre les humains, elle engage à renouveler les paradigmes qui commandent nos représentations et nos actions. Elle puise dans les sciences contemporaines une vision lucide de la situation et des voies d’avenir, mais elle puise plus encore dans la tradition chrétienne l’audace d’appeler à un sursaut à partir des besoins et des attentes des plus pauvres. Elle fait regarder la terre non pas comme un réservoir de ressources dont les humains tirent ce qu’ils veulent mais comme le signe d’une destinée commune non seulement de l’humanité mais de tous les êtres, où se découvre l’appel de Dieu à l’hospitalité mutuelle et à l’amour pour tous.
Le conseil permanent avait alors imaginé une première assemblée de travail sur les défis de la crise écologique en y introduisant une dose de synodalité, chaque évêque étant appelé à inviter deux personnes à l’accompagner. Nous avons été secoués et émus par les paroles qui nous furent adressées en novembre 2019, et l’assemblée a voté le principe de consacrer un jour et demi de chacune de ses rencontres pendant trois ans à cette thématique immense. Nous avions compris en effet qu’elle touchait notre annonce de la bonne nouvelle du salut. Un des premiers intervenants avait repris pour nous l’appel de Jonas : « Encore trois jours et Ninive sera détruite » en nous précisant que l’hébreu disait plutôt : « Encore trois jours et Ninive sera bouleversée », bouleversement qui aurait pu se réaliser par la ruine et qui s’est réalisé, selon le livre biblique, par la conversion.
Les confinements successifs nous ont obligé à renoncer à une de nos séquences, à en vivre deux autres en visioconférences, la séquence de novembre : « Clameur de la terre, Clameur des pauvres » a été une oasis dans notre réception du rapport de la CIASE, nous n’avons pu traiter de l’écologie humaine comme nous l’aurions voulu.
Parvenus au terme de ces trois années, nous allons conclure. Quelques-uns de ceux et de celles qui nous ont apporté leur contribution ou leur témoignage au long des années sont avec nous. Je les remercie en votre nom d’avoir répondu à notre invitation naguère et aujourd’hui. Conclure n’est pas mettre un point final. Au contraire. Nous allons travailler aux engagements que nous pourrions prendre, et nous comptons sur vous, nos invités diocésains, et aussi sur vous qui nous avez enseignés, pour réfléchir avec nous à ce qu’ils pourraient être. Nous partirons d’une reprise de nos assemblées précédentes ; nous recevrons, nous en parlerons cet après-midi, un enseignement de la part d’un théologien protestant, Martin Kopp, et d’un théologien orthodoxe, le P. Sollogoub. Les Orthodoxes nous précèdent depuis longtemps sur ces sujets et les Protestants s’engagent eux aussi fortement. C’est une joie : toutes les confessions chrétiennes se laissent interroger par le sort de notre terre et la responsabilité propre de l’humanité. Notre après-midi et notre soirée seront donc fortement œcuméniques, avec, après le dîner, un temps de prière et un temps de rencontre amicale. Demain matin, nous élaborerons ensemble des engagements de divers niveaux, que nous remettrons à Dieu lors de la messe présidée par le Nonce avant de sortir proclamer un engagement solennel, nourri par nos travaux communs. Les évêques, s’ils le veulent, concluront leur assemblée vendredi prochain par le vote d’un texte de proclamation de foi en Dieu créateur et sauveur qui sera proposé à leur vote.
Nous entrons dans cette assemblée aussi en communiant aux douloureuses épreuves de la guerre menée en Ukraine. La messe de ce jour sera présidée par Mgr Hlib Lonchyna, administrateur de l’éparchie de France, Belgique et Suisse, de l’Église gréco-catholique ukrainienne. Il la célèbrera dans le rite propre à son Église, nous associant ainsi à la supplication du peuple ukrainien, pour lui-même et pour le peuple russe. Nous tâcherons aussi d’être un moment en visioconférence avec l’Archevêque majeur de l’Église gréco-catholique d’Ukraine, Sa Béatitude Sviatoslav Shevshuk, et nous proposons aussi un jeûne ou du moins un repas allégé jeudi soir.
Bon travail à toutes et à tous et merci de la part que vous y prendrez.
Monseigneur de Moulins-Beaufort
par Mgr Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et président de la Conférence des évêques de France Lourdes – Vendredi 8 avril 2022 Chers Frères évêques, Madame et Messieurs les…
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par Mgr Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et président de la Conférence des évêques de France
Lourdes – Vendredi 8 avril 2022
Chers Frères évêques,
Madame et Messieurs les membres du secrétariat général,
Mesdames et Messieurs les directrices et directeurs des services nationaux,
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Mesdames et Messieurs, chers amis, qui nous écoutez ce matin,
L’urgence climatique, l’urgence de la situation écologique, l’urgence de la dégradation
mesurable de la biodiversité, nous les avons ressenties à travers nos invités diocésains, pendant le
premier jour de notre assemblée. Le rapport du GIEC, publié il y a quelques jours, a établi, s’il en était
besoin qu’il était trop tard pour atteindre l’objectif fixé à Paris lors de la COP 21 de limiter le
réchauffement à 1, 5° par rapport au début de l’ère industrielle. Des actions sont ou seraient encore
possibles mais elles exigent un changement drastique de nos modes de consommation, de production,
de transport, de chauffage… Nos sociétés y sont-elles prêtes ? Y sommes-nous prêts, nous réunis ici
pour ce discours de clôture ?
Or, nous l’avons réalisé une fois encore, ce sont certains pays parmi les plus pauvres de la
planète et, dans ces pays, les plus pauvres de leurs habitants, qui vont subir les premiers les
conséquences de ce réchauffement que nous ne maîtrisons pas, que nous peinons à chercher à
maîtriser même un peu. L’urgence, que nos invités nous ont fait ressentir encore, est celle de leurs
enfants, jeunes adultes ou adolescents, dont certains sont très mobilisés par toutes les problématiques
du changement de mode de vie, dont beaucoup vivent dans l’anxiété ou l’angoisse pour demain. Notre
pays, la France, est, nous le savons, spécialement privilégié : nous l’avons éprouvé encore en le
traversant pour venir ici à Lourdes, sous un soleil radieux, dans la splendeur du printemps, où tout paraît facile et fécond. Nous n’ignorons pas pourtant les violences toujours possibles du climat, qui
peuvent détruire les espoirs de récolte ; nous savons, nous les avions entendus s’il en était besoin en
novembre dernier, l’angoisse que connaissent certaines personnes et certaines familles devant le
renchérissement du coût des carburants dont ils ont besoin pour aller travailler, en particulier dans le
monde rural, et qui obère leur capacité à se nourrir et à nourrir leurs enfants, l’impossibilité pour ceuxlà de se nourrir d’une manière suffisante et en tout cas saine.
Or, « urgence », à nous évêques, évoque sans doute une urgence d’un autre ordre. Un verset
de saint Paul, dans sa deuxième lettre aux Corinthiens, au chapitre 5, l’évoque de manière saisissante :
Caritas Christi urget nos, « l’amour du Christ nous presse, nous saisit, dit désormais la traduction
liturgique, quand nous pensons qu’un seul est mort pour tous. » L’amour du Christ nous presse de
nous faire proches des frères et sœurs lointains qui, les premiers, souffrent et souffriront des effets du
changement climatique ; l’amour du Christ nous presse de faire proches de toute forme de vie ou
même d’être, en nous réjouissant d’être interdépendants les uns des autres, devant la possibilité de
notre existence à l’atmosphère, à l’eau, à l’air, à des micro-organismes innombrables, aux minéraux,
aux végétaux, aux animaux, en qui nous reconnaissons des traces, des vestiges, des signes du Créateur
et de sa bonté et l’amour du Christ nous presse lorsque nous constatons combien notre maison
commune est abîmée, cette maison commune que lui, le Fils bien-aimé du Père, est venu habiter luimême, pour y vivre avec nous et y mourir par nous et pour nous. Plus que jamais sans doute, nous
devons constater que le moindre de nos actes : nous nourrir, nous habiller, nous déplacer, nous
informer, nous rencontrer, déclenche une série de causes dont beaucoup abîment durablement la
« maison commune ». Il y a urgence donc à agir, urgence à nous convertir, pour que le Christ puisse
être aimé et pour que le Père qui l’a envoyé puisse être glorifié sans réserve. Les fortes interventions
du P. Serge Sollogoub et de M. Martin Kopp nous ont aidés et peut-être même nous ont appris à mieux
aimer le Seigneur Jésus, dans le mystère de son Incarnation, en le contemplant entré dans la création,
dévoilant notre péché jusqu’au péché contre l’œuvre créatrice, et étant en lui-même, jusque dans sa
chair ressuscitée, l’affirmation initiale et définitive : que tout cela est très bon.
Certains de vous qui m’écoutez, certaines et certains de nos invités de mardi et mercredi,
beaucoup peut-être qui se sont intéressés à nos travaux sur l’écologie intégrale, seront déçus peutêtre que nous ne publiions pas aujourd’hui, malgré ce que nous avions annoncé, un texte de
proclamation de foi en Dieu créateur et sauveur ni des engagements fermes. Le temps nous a manqué.
L’urgence de la situation et l’amour du Christ nous pressent, nous en sommes conscients. Un texte
avait été préparé, lu et relu, soumis au regard de tous les évêques et de la commission doctrinale, mais
il a manqué de temps pour l’élaborer ensemble, pour que tous et chacun des évêques et au-delà d’eux,
pour que nos communautés puissent se l’approprier en vérité. Des engagements ont été suggérés par
les référents écologie des diocèses, ils ont été travaillés ici, entre invités et évêques, mais ce temps-là
n’a pas été suffisant pour qu’ils expriment un désir fort, un désir brûlant, des évêques, de leurs invités,
des communautés chrétiennes. Le conseil permanent a donc choisi de confier ces documents : la
proclamation de foi et les engagements au conseil « Famille et Société » et, sous sa conduite, au réseau
des référents diocésains, pour qu’ils soient travaillés, pour qu’un jour prochain, à travers eux revus,
retravaillés, réélaborés, puisse s’exprimer notre amour à tous pour le Dieu créateur et pour celles et
ceux dont il nous donne de nous faire les prochains. Beaucoup se fait déjà : les évêques poursuivront
leur conversion écologique, les diocèses et les paroisses enrichiront leurs initiatives en ce sens, tous
aidés par les référents dont ils se dotent et nous suivrons avec attention notre progression collective
au long des prochaines années.
Dans ce pas de côté, qui peut, encore une fois, décevoir, se trahit notre besoin de revoir nos
structures de travail commun, afin que toujours mieux, plus souplement, plus adéquatement, l’amour
du Christ qui nous presse puisse se traduire en actes et, s’il le faut, en paroles. Permettez-moi de situer
ici le chemin de transformation que nous avons engagé. Nous aspirons à une collégialité qui nous rende
mieux attentifs les uns aux autres, sans oublier que la collégialité, en sa vérité ecclésiologique, s’exerce
dans la totalité du collège épiscopal qui succède au collège des Apôtres ; nous comprenons aussi que
la collégialité rend possible la synodalité, c’est-à-dire la marche commune du peuple de Dieu en
l’inscrivant dans l’appel du Christ Jésus et son envoi. Plus qu’une organisation plus souple et économe,
nous désirons être mieux capable de faire entendre la promesse de Dieu à « toute la création » (Mc
16). Nous, évêques, remercions les personnes qui ont accepté de nous aider à réfléchir à cette
transformation, de nous accompagner sur ce chemin. Nous saluons aussi celles et ceux qui ont
participé au processus synodal que le pape nous fait vivre. La belle méditation de la synodalité que
nous a offerte le Métropolite Dimitrios pourra nous inspirer tandis que celle du Pasteur François
Clavairoly sur la souveraineté du Christ face à l’ultime limite qu’est la mort et sur l’impératif de justice
qui en découle nous rappellera longtemps que la parole de foi est aussi une parole de responsabilité
et de justice. Avec le témoignage de Mgr Khatchatryan et la présence du Pasteur Christian Blanc, ce
moment œcuménique a renforcé en nous l’amour du Christ que nous sommes si heureux de pouvoir
confesser ensemble.
Nous avons entendu dans la liturgie de l’Eucharistie de ces jours le chapitre 8 de l’évangile
selon saint Jean. J’en retiens ce verset : « Si vous demeurez fidèles à ma parole, vous êtes vraiment
mes disciples ; alors vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres. » Or, quelle est, face à la
terre, au sol, au ciel, à tous les êtres que nous y rencontrons, qui nous permettent d’être, la parole de
Dieu à entendre ? « Dieu vit que cela était bon » et même : « Dieu vit que cela était très bon ».
Comment rendre possible à tous d’éprouver cette bonté originelle, lorsqu’elle se trouve polluée,
défigurée, par les besoins de nos sociétés, par la captation qu’exercent les plus riches, les sociétés les
plus riches et les plus riches dans les diverses sociétés. Outre nos fautes personnelles dans le gaspillage
ou l’excès de consommation, par exemple, nous appartenons à des structures de péché dont nous ne
pouvons pas dire jusqu’à la fin des temps qu’elles échappent à notre responsabilité. Pour nous
chrétiens, c’est par le péché que la mort, la vraie mort, la mort qui renvoie vers le néant, est entrée
dans le monde. Nous ne pouvons, face au Christ, esquiver longtemps la question de notre péché et de
notre esclavage à son égard, mais nous le recevons comme une bonne nouvelle libératrice : nous ne
sommes pas condamnés, nous les humains, à nous comporter en prédateurs sur cette terre, nous ne
sommes pas condamnés à y semer la mort et la désolation, nous ne sommes pas voués à ne pouvoir
vivre qu’au détriment de l’existence des autres, des plus pauvres et des plus fragiles. Nous pouvons
être les intendants de Dieu, les serviteurs fidèles et sensés, qui contemplent la sagesse de Dieu et en
font fructifier les dons pour le bien de tous. Nos sociétés occidentales prennent conscience que leur
développement remarquable s’est fait, malgré tout, au détriment d’autres régions du monde et que
sa course en avant dans la croissance continue à n’être possible que par la pollution ou la destruction
d’autres espaces et d’autres êtres. Nous devons oser dénoncer les structures de péché. Nous voulons
proclamer à tous que d’autres manières de vivre en humains sont possibles et qu’elles peuvent être
réjouissantes, nous unissant davantage à notre Créateur et Sauveur.
Notre envoi de mercredi matin, nous l’avons fait devant des collégiens des établissements
lassaliens du Sud-Ouest de la France venus en pèlerinage. C’était une chance. Si modeste notre texte
puisse-t-il être, il veut dire aux générations qu’aucune épreuve, aucune difficulté, aucun drame ne peut
totalement empêcher d’être des artisans de la réconciliation avec Dieu et en Dieu. Nous n’avons pas
la solution à la crise écologique, nous ne savons comment produire sans susciter des déchets ou
polluer. Mais nous sommes pleins d’espérance que toute recherche des humains en ce sens prépare
le matériau du Règne à venir, ce que le Christ pourra récapituler pour la vie éternelle.
Face à la crise écologique, nous sommes conduits à être lucides comme nous avons appris à
l’être à l’égard des violences et agressions sexuelles. Les personnes victimes ont souffert et souffrent
d’avoir été objets de prédation, d’avoir été traitées comme des choses, des objets de désirs non
maîtrisés d’un adulte, a fortiori d’un prêtre qui devrait être l’expression même de l’amour du Christ
qui nous tire de nous-mêmes pour nous réconcilier avec Dieu et les uns avec les autres. Nous avons,
pendant cette assemblée, fait le point sur la mise en œuvre des mesures que nous avions décidées en
novembre. Les groupes de travail prévus sont enfin en place, le fonds SELAM est opérationnel,
l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (INIRR) accueille celles et ceux
qui veulent s’adresser à elle (526 situations enregistrées à ce jour) et commence à entrer en relation
avec les personnes concernées, le tribunal pénal canonique sera opérationnel dans trois semaines.
Tout cela a été un peu plus lent qu’espéré, mais le pas décisif est franchi. Je remercie au nom des
évêques M. Hervé Balladur qui a accepté de coordonner les groupes de travail et, à travers lui, les 9
pilotes de ces groupes et la centaine de personnes qui ont accepté d’y participer, notamment des
personnes victimes envoyées par des associations ou des collectifs, ce qui marque aussi le progrès
atteint dans nos relations. J’exprime ma gratitude à M. Gilles Vermot-Desroches et aux fondateurs du
fonds SELAM et aussi à Mme Marie Derain de Vaucresson et à l’équipe qu’elle réunit peu à peu autour
d’elle. Nous sommes reconnaissants, profondément, pour la générosité de leur engagement. En même
temps que les équipes de la Commission Reconnaissance et Réparation de la CORREF, ces personnes
vont mettre au point, peu à peu, une manière inédite de relation avec des personnes victimes, qui ne
relèvera ni de l’assurance ni de la justice, mais qui ne nie ni ne remplace ni l’une ni l’autre, qui cherche
plutôt à rendre possible à nouveau une relation avec l’Église, pour les personnes qui le désirent, même
si c’est à distance et à travers un intermédiaire. Ainsi espérons-nous humblement mais de manière
déterminée ouvrir un chemin de réconciliation là où il y a eu profanation. Nous sommes conscients
que nous avons encore à travailler. Le petit enfant qui pleure, fixé à l’entrée de notre hémicycle, nous
accompagne, comme un frère ou une sœur dont la douleur ne peut être oubliée, et nous portons au
cœur l’espérance qu’un jour ses larmes de souffrance puissent être des larmes d’émotion. Le Conseil
pour la lutte contre la pédophilie et le service national nous y aideront. Nous avons découvert encore,
en novembre dernier, comme il est juste et bon de reconnaître son péché : c’est la condition pour
sortir de la complicité avec les forces de mort et de l’esclavage de la prédation.
Nous avons vécu cette assemblée dans le contexte de la guerre en Ukraine. Je redis au nom
des évêques notre amitié fraternelle à Mgr Hlib Lonchyna, évêque de l’éparchie gréco-catholique de
Paris. Célébrer avec lui la messe en rite gréco-catholique ukrainien, nous a associés en profondeur à sa
prière et à sa supplication pour ce pays qui lutte pour la vérité et la justice. Je remercie aussi tous ceux
et toutes celles qui offrent de l’aide pour le peuple ukrainien. L’éparchie peut être le canal adéquat
pour la faire acheminer. Là encore, la charité du Christ nous presse, parce que c’est lui qui meurt encore
à Kharkiv ou à Mariopolis, chaque fois qu’un être humain meure ou souffre de la faim, c’est lui qui
meurt parce qu’un autre peuple, surtout un peuple chrétien, prétend prendre ce qui n’est pas à lui.
Nous n’oublions pas pour autant le drame de l’Arménie et les destructions culturelles irréversibles que
l’Azerbaïdjan fait subir à la zone qu’il a conquise, Mgr Katchatryan en a porté témoignage devant nous.
Nous pensons encore et toujours au Liban où la présidence de notre Conférence espère pouvoir aller
en mai rendre visite aux différents chefs d’Églises et rencontrer ceux et celles qui bénéficient de ce que
les Français peuvent envoyer. Le 25 mars dernier en la fête de l’Annonciation, nous nous sommes
joints, comme il nous le demandait, au geste du Saint-Père qui consacrait l’humanité entière et donc
notre pays, mais spécialement la Russie et l’Ukraine au cœur immaculé de Marie. Avec lui, nous
demandons instamment que se lève sans tarder une paix dans la justice et la vérité, une paix des armes
qui prépare celle des cœurs, une réconciliation des frères, un temps ennemi, par-delà toute haine, tout
ressentiment, toute douleur.
Dimanche, après-demain, sera jour d’élection présidentielle dans notre pays. Les enjeux en
sont grands, l’issue est incertaine. Mais ce dimanche est surtout pour nous celui des Rameaux. Nous
tous baptisés allons acclamer le Seigneur qui entre dans Jérusalem. Il est le roi, le seigneur de nos
âmes. Lui seul est digne que nous lui attachions notre liberté. Lui seul est le roi doux et humble, qui
monte monté sur un âne. Devant lui toute puissance politique se trouve relativisée, non pas humiliée,
non pas détrônée, mais mise à sa place. Dimanche, nous n’élirons pas un sauveur de la France, ni un
messie, ni quelqu’un qui devrait incarner tout le bien à faire. Nous aurons à choisir un responsable
politique, homme ou femme, celui ou celle qui aura à conduire notre pays dans les temps toujours
incertains où l’humanité avance, dans ces temps spécialement incertains de fractures sociales, de crise
sanitaire, de crise écologique, de guerre toujours possible. Il n’aura pas la solution à tout, il ne pourra
pas empêcher toute immigration, il ne saura pas inventer l’énergie infiniment renouvelable,
transportable, efficace. Il ne pourra pas non plus changer les cœurs. Il aura à nous conduire tous, sur
la moins mauvaise voie possible, en cherchant, selon ce que préconise le texte du conseil permanent
à propos des élections, en cherchant à renforcer notre élan collectif pour choisir de vivre ensemble en
paix. Vivre cela n’est pas établir le Royaume des cieux, c’est le symboliser, et c’est déjà s’orienter, le
sachant ou non, le voulant ou non, la réconciliation en Dieu.
Il y a un siècle cette année, le 2 mars 1922, le pape Pie XI confirmait Marie, dans le mystère de
son Assomption, patronne principale de la France, et sainte Jeanne d’Arc, patronne secondaire. Il y a
80 ans, le 23 août 1942, le cardinal Saliège, archevêque de Toulouse, pourtant perclus par la maladie,
à moitié paralysé, publiait sa lettre pastorale sur la personne humaine, alors que le régime de Vichy
avait publié les lois antijuives et contribué aux rafles des nazis. Des personnes courageuses ont
distribué ce texte dans les paroisses du diocèse pour qu’il soit lu en chaire. Dans une telle parole, dans
de tels actes, nous percevons la France, notre pays, dans ce qu’il a de meilleur et de vrai, dans sa vraie
liberté. Un chercheur, spécialiste des violences de masse, Jacques Semelin, a étudié ce qui a rendu
possible que les deux-tiers des Juifs de France échappent à la solution finale. Quelques-uns ont été
sauvés par des Justes, conclut-il, beaucoup, en fait par eux-mêmes, mais ils ont pu le faire parce que
quelqu’un, pas toujours mais souvent, un baptisé, leur a ouvert une porte, offert un déjeuner, plus
simplement encore les a laissé passer sans rien dire ni rien voir.
Là se perçoit l’âme chrétienne de notre pays, façonnée par la charité, qui reconnaît le Christ
dans toute détresse, le Christ Jésus qui, non seulement est entré dans sa création, mais qui, selon le
mot de saint Paul, « s’humilia plus encore » (Ph 2), et celui du bientôt saint Charles de Foucauld qui
nous a été commenté, est le Christ de l’abjection, celui qui dût se cacher ; dans une telle parole et de
telles actes vibre la sainteté ordinaire qui se consume au jour le jour dans le don de soi et se tient prête
à se donner tout d’un coup lorsqu’il le faut ; la sainteté ordinaire et extraordinaire qui sait se faire
hospitalité lorsqu’il le faut. Il me faut le dire encore : l’âme du cardinal Saliège était indemne de tout
antisémitisme et il y a encore trop d’antisémitisme, caché ou non, dans notre pays ; le Christ de
l’abjection, il pourrait être dans des personnes âgées qui sentiraient peser la pression de l’euthanasie
si celle-ci était un jour légalisée. il est déjà dans les migrants clandestins ou non que notre Etat et, plus
généralement, notre société ont du mal à accueillir comme des frères et sœurs en humanité traite
comme des délinquants. Le 15 août prochain, nous pourrons rendre grâce à Dieu pour la protection
de notre Dame sur notre pays et en renouveler la consécration, en suppliant pour que de nombreux
Saliège ou Théas se lèvent, de nombreuses Thérèse Dauty, lorsqu’il le faut. Et nous reconnaissons volontiers
l’œuvre de Dieu en tant de non-chrétiens ou de peu chrétiens qui savent aussi trouver le geste ou la
parole qui amènent de la vie et de l’amour là où la peur et la haine pourraient l’emporter. Notre pays
ne se définit pas par la nostalgie de ses grandeurs passées, il ne se grandit pas en prétendant s’entourer
de murs, il ne se grandirait pas non plus s’il en venait à renoncer à accompagner les êtres humains
jusqu’au bout de leur vie en les entourant de fraternité au profit d’une mort prétendument douce.
Notre pays est vivant lorsqu’il porte au milieu des nations la voix du respect de toute personne
humaine et de l’espoir de pouvoir nouer une alliance avec elle.
Chers Frères évêques, nous nous retrouverons en juin, pour l’assemblée plénière extraordinaire consacrée au synode sur la synodalité qui se tiendra à Lyon. Cette année est riche, pour certains elle est lourde, en rencontres. Nous y exercerons le discernement qui nous est demandé et que nous devrons rendre au nom du Seigneur Jésus. Vous vous êtes dotés d’une présidence et d’un conseil permanent renouvelés, qui prendront le relais à partir du 1er juillet. Que le Seigneur rende au centuple à nos Frères Olivier Leborgne, Pascal Wintzer, Philippe Mousset, Jean-Pierre Batut, Jean-Marc Eychenne, ce qu’ils ont donné pendant leurs années au conseil permanent ; qu’il fortifie nos Frères Vincent Jordy, Jean-Marc Aveline, Pierre-Antoine Bozo, Sylvain Bataille, Alexandre Joly qui vont y rejoindre Dominique Lebrun et Matthieu Rougé.
Ensemble, nous tâcherons de vous servir pour que tous, nous rendions gloire à Dieu par notre action. Puissiez-vous tous, lors de la messe chrismale, éprouver avec les prêtres, les diacres et tous les baptisés, combien l’amour du Christ nous presse et comme il doux et fortifiant d’être saisis par lui,
+Eric de Moulins-Beaufort
Ce vendredi 08 avril se sont achevés les travaux de l’Assemblée plénière de la Conférence des évêques de France (CEF) réunie depuis le mardi 05 avril à Lourdes. Cette assemblée…
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Ce vendredi 08 avril se sont achevés les travaux de l’Assemblée plénière de la Conférence des
évêques de France (CEF) réunie depuis le mardi 05 avril à Lourdes.
Cette assemblée a permis aux évêques d’approfondir ensemble des sujets marquants pour l’Église en France.
L’Assemblée a débuté par une séquence d’une journée et demie, mardi et mercredi matin, consacrée
à l’écologie intégrale, occasion de faire le bilan de la séquence ouverte il y a trois ans et d’envisager
des perspectives pour poursuivre le travail dans les diocèses.
La séance de travail de l’après-midi de mercredi fut consacrée à l’avancée des résolutions votées par
les évêques réunis en Assemblée plénière en mars et en novembre 2021, pour lutter contre les
agressions et violences sexuelles sur mineurs et personnes vulnérables.
Madame Marie Derain de Vaucresson, Monsieur Gilles Vermot-Desroches, et Monsieur Hervé Balladur, ont présenté respectivement les missions et le fonctionnement de l’INIRR (Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation), du Fonds SELAM (Fonds de secours et de lutte contre les abus sur mineurs) et des neuf groupes de travail constitués à la demande des évêques.
Jeudi, les évêques et des personnes invitées se sont réunis pour réfléchir à des chemins de transformation de la Conférence des évêques de France.
L’Assemblée a également élu des membres du Conseil permanent, 8 présidents de Conseils, le
président et des membres de la commission doctrinale.
Les membres élus au conseil permanent de la Conférence des évêques de France
L’Assemblée plénière d’avril 2022 a été l’occasion, pour les évêques, de procéder à l’élection des membres du Conseil permanent. Après avoir élu la présidence de la Conférence des évêques de France, les évêques ont réélu ou élu les membres suivants :
Sont élus pour un deuxième mandat de 3 ans :
Mgr Matthieu ROUGÉ
Évêque de Nanterre, représentant un diocèse de plus d’1 million d’habitants
Mgr Dominique LEBRUN
Archevêque de Rouen, évêque ayant plus de 10 ans d’ancienneté dans l’épiscopat
Sont élus pour un premier mandat de 3 ans :
Mgr Alexandre JOLY
Évêque de Troyes, évêque ayant moins de 5 ans d’ancienneté dans l’épiscopat
Mgr Pierre-Antoine BOZO
Évêque de Limoges, représentant un diocèse de moins de 500 000 habitants
Mgr Jean-Marc AVELINE
Archevêque de Marseille, évêque ayant entre 5 et 10 ans d’ancienneté dans l’épiscopat
Mgr Sylvain BATAILLE
Évêque de Saint-Étienne, représentant un diocèse de 500 000 à 1 million d’habitants
Ces membres élus prendront leur fonction à partir du 1er juillet 2022, le Conseil permanent sera alors
composé des membres suivants :
Mgr Éric de MOULINS-BEAUFORT, archevêque de Reims, Président de la CEF
Mgr Dominique BLANCHET, évêque de Créteil, Vice-président de la CEF
Mgr Vincent JORDY, archevêque de Tours, Vice-président de la CEF
Mgr Dominique LEBRUN, archevêque de Rouen
Mgr Matthieu ROUGÉ, évêque de Nanterre
Mgr Alexandre JOLY, évêque de Troyes
Mgr Pierre-Antoine BOZO, évêque de Limoges
Mgr Jean-Marc AVELINE, archevêque de Marseille
Mgr Sylvain BATAILLE, évêque de Saint-Étienne
Pour mémoire, le Conseil permanent actuel (en fonction jusqu’au 30 juin 2022) est composé de :
Mgr Éric de MOULINS-BEAUFORT, archevêque de Reims, Président de la CEF
Mgr Dominique BLANCHET, évêque de Créteil, Vice-président de la CEF
Mgr Olivier LEBORGNE, évêque d’Arras, Vice-président de la CEF
Mgr Jean-Pierre BATUT, évêque de Blois
Mgr Jean-Marc Eychenne, évêque de Pamiers
Mgr Dominique LEBRUN, archevêque de Rouen
Mgr Philippe MOUSSET, évêque de Périgueux
Mgr Matthieu ROUGÉ, évêque de Nanterre
Mgr Pascal WINTZER, archevêque de Poitiers
Le Conseil permanent est l’organisme qui reçoit délégation de l’Assemblée plénière et devant laquelle il est responsable pour :
* Veiller à l’exécution des décisions prises par l’Assemblée ;
* Assurer la continuité de l’action pastorale d’une Assemblée à l’autre ;
* Assurer la coordination du travail des commissions épiscopales, des conseils et des groupes de travail ;
* Nommer les directeurs des services nationaux ;
* Régler les questions urgentes qui n’exigent pas une décision de l’Assemblée ;
* Préparer les sessions de l’Assemblée.
Le Conseil permanent comprend :
– La présidence (composée du Président de la CEF, et des deux Vice-présidents)
– Six évêques élus (pour un mandat de trois ans renouvelable une fois) :
– D’un diocèse de moins de 500 000 d’habitants
– D’un diocèse entre 500 000 et 1 million d’habitants
– D’un diocèse de plus de d’1 million d’habitants
– Un évêque ayant moins de 5 ans d’ancienneté
– Un évêque ayant entre 5 et 10 ans d’ancienneté
– Un évêque ayant plus de 10 ans d’ancienneté
– L’archevêque de Paris (membre de droit)
Le Conseil permanent se réunit deux à trois jours par mois, de septembre à juin, et plus souvent si nécessaire.
Les Présidents élus des Conseils de la Conférence des évêques de France :
* Président du Conseil pour la catéchèse et le catéchuménat : Mgr Olivier LEBORGNE, évêque d’Arras, pour un premier mandat. Il succède à Mgr Vincent JORDY, archevêque de Tours.
* Président du Conseil financier : Mgr Denis MOUTEL, évêque de Saint-Brieuc et Tréguier, pour un second mandat.
* Président du Conseil pour les mouvements et associations de fidèles : Mgr François FONLUPT, archevêque d’Avignon, pour un second mandat.
* Président du Conseil pour les affaires économiques, sociales et juridiques : Mgr Denis MOUTEL, évêque de Saint-Brieuc et Tréguier, pour un second mandat.
* Président du Conseil solidarité et diaconie : Mgr Pascal DELANNOY, évêque de Saint-Denis, pour un second mandat.
* Président du Conseil pour l’Enseignement catholique : Mgr Laurent ULRICH, archevêque de Lille, pour un second mandat.
* Secrétaire général de l’Enseignement catholique : M. Philippe DELORME, pour un second mandat.
* Président du Conseil de Prévention et de lutte contre la pédophilie : Mgr Thibault VERNY, évêque auxiliaire de Paris, pour un premier mandat. Il succède à Mgr Luc CREPY, évêque de Versailles.
*Président du Conseil pour les relations interreligieuses et les nouveaux courants religieux : Mgr Norbert TURINI, évêque de Perpignan-Elne, pour un premier mandat. Il succède à Mgr Jean-Marc AVELINE, archevêque de Marseille.
Les membres élus à la Commission doctrinale :
Le Président de la Commission doctrinale : Mgr Benoît BERTRAND, évêque de Mende, pour un
premier mandat. Il succède à Mgr Laurent CAMIADE, évêque de Cahors.
Ont été élus membres de la Commission doctrinale :
Mgr Jean-Pierre BATUT, évêque de Blois
Mgr Jean-Luc GARIN, évêque de Saint-Claude
Mgr Gérard Le STANG, évêque d’Amiens
Mgr Alain LE GUELLEC, évêque auxiliaire de Montpellier
Ils prendront leur fonction le 1er juillet 2022.