Dt 26, 4-10 ; Ps 90 (91) ; Rm 10, 8-13 ; Lc 4, 1-13
Chers catéchumènes,
En lisant les lettres que vous m’avez adressées pour demander le sacrement du baptême, j’ai été frappé par les chemins parfois bien longs et tortueux qui vous ont permis un jour de faire l’ultime démarche pour demander à recevoir les sacrements de l’initiation chrétienne.
Ce sont de beaux chemins de vie et de foi, mais pas sans épreuves et même souvent dans un véritable combat spirituel.
C’est à dire une lutte intérieure pour continuer à cheminer vers le Seigneur malgré les nombreux obstacles qui se sont présentés à vous : épreuves de santé, deuils, épreuves sentimentales, affectives, mais également des quêtes spirituelles vers d’autres croyances ou spiritualités qui ne vous ont pas mis dans la paix, bien au contraire ! Je pense aussi à la pandémie de COVID qui a été pour beaucoup une véritable épreuve ! Ou encore simplement les soucis de la vie, les préoccupations de tous ordres qui vous ont éloignés de Dieu à un moment ou à un autre.
Dans ce chemin, le Seigneur n’était pas absent de votre vie. Vous avez aussi fait l’expérience de son amour. Le Christ vous a parfois rattrapé par la main pour vous remettre debout, pour vous aider à surmonter les épreuves et à trouver la paix et la joie intérieure, signe par excellence que vous étiez enfin sur la bonne route, la route de la vraie Vie.
En écoutant le passage d’Évangile qui nous relate les tentations de Jésus au désert, nous comprenons que Jésus a voulu partager totalement notre condition humaine en éprouvant, lui aussi, ce combat spirituel.
Volontairement, Jésus est parti pendant 40 jours dans le désert. Il n’était pas seul, l’Esprit Saint était avec lui. « Il ne mangea rien pendant ces jours-là, et quand ce temps fut écoulé, il eut faim ». En éprouvant durement son corps, Jésus s’est mis volontairement en situation de vulnérabilité. Il a fait l’expérience que nous faisons aussi lorsque nous sommes fatigués, éprouvés, découragés. C’est à ce moment-là que nous sommes le plus vulnérables et que nous risquons de faire des choix destructeurs pour nous et pour les autres !
Le diable s’approche donc de lui afin de profiter de sa vulnérabilité pour le faire chuter, l’écarter de sa mission, mettre en échec l’œuvre de Salut qu’il est venu accomplir en ce monde. Jésus est passé par ce combat spirituel afin de nous montrer que c’était un passage nécessaire pour que nous soyons prêts à le suivre, à nous engager à sa suite. Mais, dans ce passage d’Évangile, il nous montre aussi comment nous pouvons en sortir victorieusement.
Jésus, nous l’avons entendu, s’est appuyé solidement sur la Parole de Dieu : « Il est écrit : l’homme ne vit pas seulement de pain. » C’est la Parole de Dieu qu’il a longuement méditée, qu’il connaît par cœur, qui va lui permettre de tenir bon devant les pièges du tentateur.
Des pièges tellement subtils que le diable lui-même utilisera la Parole de Dieu, notamment deux passages des Psaumes, mais en les détournant de leur sens pour tromper Jésus ! Or Jésus ne tombe pas dans le piège : « Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu ».
En fait, ces 40 jours au désert résument le combat spirituel que Jésus va affronter toute sa vie, notamment quand la foule voudra faire de lui un roi ou quand ses disciples chercheront à l’empêcher de monter à Jérusalem afin de lui éviter une fin tragique. Il devra résister et tenir bon courageusement pour rester fidèle à l’œuvre de Salut qu’il est venu accomplir.
Ce combat spirituel, il n’y a pas que vous les catéchumènes qui l’éprouvez. Nous tous qui avons été baptisés et confirmés, nous continuons de vivre toute notre vie ce combat spirituel qui seul peut nous permettre d’être fidèles à l’Évangile et de suivre le Christ sur le chemin de la Vie. Comme le dit Tertullien : « On ne naît pas chrétien, on le devient ».
Dans ce combat intérieur, la Parole de Dieu est centrale, car c’est sur elle que nous nous appuyons pour grandir dans la foi et nous enraciner dans la volonté de Dieu. Comme le dit saint Paul dans la deuxième lecture : « Tout près de toi est la Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur. Cette Parole, c’est le message de la foi que nous proclamons ».
C’est cette parole qui nous permet de choisir la vie alors que tant d’occasions ou de sollicitations nous poussent à choisir des chemins souvent plus attirants, mais sans issue, ou pire, des chemins mortifères. La société ne nous aide pas toujours à devenir chrétiens et nous devons parfois naviguer à contre-courant de l’opinion publique ou même de nos proches !
Le temps du Carême dans lequel nous venons d’entrer et qui va durer 40 jours comme pour Jésus au désert, a pour but justement de nous permettre, à la suite de Jésus, d’éprouver notre foi, de la rendre plus solide et plus ajustée à la volonté de Dieu. C’est un temps d’épreuve dans le sens que nous utilisons par exemple pour les épreuves sportives qui demandent un entraînement rude, mais qui ont du sens, car elles nous permettent d’espérer la victoire. Le Carême, ce n’est donc pas déprimant, au contraire, nous voyons grandir en nous la foi, l’espérance et la charité et cela nous apporte beaucoup de joie !
Durant ce Carême, vous vivrez les scrutins dans vos paroisses, ces étapes qui vous ouvriront pleinement à la foi chrétienne avec le soutien de la prière de tous les baptisés. C’est ce qu’on appelle le temps de la purification et de l’illumination car vous recevrez la force de Dieu, Lui qui vous délivre de tout mal et qui ouvre vos yeux à la lumière de la foi.
Chers catéchumènes, dans quelques instants, nous allons célébrer votre Appel décisif. C’est un moment important de votre cheminement vers les sacrements de l’initiation chrétienne. Que notre prière vous accompagne et que ce Carême nous rende tous plus forts devant les tentations de ce monde et nous purifie de nos œuvres mauvaises pour que nous soyons vraiment libres « d’invoquer le nom du Seigneur » et d’accueillir la grâce de son amour miséricordieux. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon