Ex 23, 20-23a ; Ps 90 ; Mt 18, 1-5.10
Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement
Frères et Sœurs,
Il se trouve qu’aujourd’hui, nous faisons mémoire, au cœur de ce Congrès Mission, des saints Anges gardiens. D’après saint Grégoire Le Grand, les Anges désignent non pas leur nature, mais leur fonction. Ici, la fonction est bien précisée : ils sont les gardiens. De qui ? De chacun d’entre nous bien sûr. Mais de quoi ? Ça, c’est un grand mystère…
Mais, en ce Congrès Mission, ils nous révèlent plusieurs choses. Tout d’abord, la proximité de Dieu : à l’égard de chacun de nous Il se fait proche et manifeste son amour miséricordieux, et ce « gardiennage » n’est-il pas justement de nous soutenir dans le combat spirituel ? Et ensuite, la volonté du Seigneur de nous protéger et même de nous délivrer du mal, de nous accompagner sur le chemin de notre existence pour nous donner « la vie, la vie en abondance » (Jn 10,10).
Ce message, nous le recevons pour nous comme une promesse qui se révèle dans nos vies, et je pense que le Seigneur nous donne un certain nombre de signes qui nous font percevoir cet amour du Seigneur et sa miséricorde, nous pouvons en témoigner. Un message que nous avons à transmettre au plus grand nombre, car le Seigneur nous a envoyés pour cela. Cette mission n’a rien de facile, car il y a beaucoup de résistances.
Je pense, évidemment, tout d’abord aux résistances externes, celles que Jésus lui-même a expérimentées lorsque les gens refusaient de le croire, jusqu’à le condamner à la mort, ou bien les Apôtres qui ont été persécutés, et enfin l’expérience que nous faisons nous-mêmes l’expérience face à l’incroyance.
Mais, nous avons également nos résistances internes : nos peurs, de témoigner par exemple à cause des conséquences possibles, notre difficulté aussi à croire que l’Esprit de Dieu agit déjà dans le cœur de beaucoup de gens (Il nous précède et nous en avons de nombreux signes), mais encore, notre difficulté à changer nos habitudes, ou nos manières de faire.
Et puis, il y a une autre résistance interne, et elle est de taille, que le prophète Baruc dans la première lecture a très clairement exprimée : nos péchés, nos manquements, nos erreurs, qui altèrent considérablement notre témoignage jusque parfois en faire un contre-témoignage.
Nous vivons une période où l’Église doit assumer ses erreurs passées. Dans quelques jours, le rapport de la CIASE paraîtra. Nous l’avons voulu, car nous voulons faire la vérité. Nous savons que cette vérité est difficile à accepter, mais ce chemin de purification est une étape nécessaire dans la mission qui nous est confiée. Accueillons aujourd’hui les encouragements du prophète Baruc : « Courage, mon peuple (…) Courage, mes enfants, criez vers Dieu ! Celui qui vous a infligé l’épreuve se souviendra de vous. ».
La mission ne peut éviter la croix, mais le Seigneur nous apporte le réconfort de son Esprit Saint pour que, jamais, nous ne soyons découragés et que, sans faiblir, nous annoncions les merveilles de Dieu. Au fond, la reconnaissance de nos tords, de notre péché et même la persécution, nous pousse à l’humilité et c’est une bonne chose.
La mission ne peut se vivre que dans l’humilité. Jésus nous le rappelle dans l’Évangile : « Amen, je vous le dis : si vous ne changez pas pour devenir comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. » (Mt 18,1-14). Nous en faisons l’expérience déjà par le fait que dans l’évangélisation nous ne pouvons pas maîtriser les fruits que tous nos efforts peuvent porter. Et c’est une bonne chose finalement ! Nous pouvons témoigner, mais le reste ne dépend pas de nous. Devenir comme des enfants, c’est aussi accepter nos fragilités, mais non pas nos péchés. C’est accepter nos dépendances, notamment le contexte historique, social, politique dans lequel nous sommes. C’est dans ce monde-ci que nous vivons notre mission et pas dans le monde de nos grands-parents. C’est bien dans les défis de ce monde actuel que nous avons à vivre notre mission : défis écologiques, éthiques, sociétaux… mais c’est bien sûr aussi dans ce monde-ci que Dieu manifeste sa présence et son œuvre de Salut. C’est dans ce monde-ci qu’Il nous envoie pour que le feu de son amour vienne changer « les cœurs de pierre en cœur de chair » (Ez 36:26). Ce qui nous menace le plus actuellement c’est le découragement, le manque d’espérance. Devenir comme des enfants, c’est grandir dans la confiance en Dieu, dans la foi inébranlable dans le Christ, Dieu qui a pris chair de notre chair en subissant toutes les résistances de la nature humaine.
En mettant résolument le Christ au centre de notre vie, et en marchant à sa suite, nous sommes absolument sûrs de ne pas nous tromper de chemin ! En nous mettant au service des plus pauvres, des plus fragiles, c’est Lui que nous servons comme nous l’avons entendu dans l’Évangile. En témoignant de notre foi avec courage et humilité, nous sommes sûrs que le Seigneur fera de belles choses dans notre vie, et par nous, en ce monde.
Comme le dit le prophète Baruc : « Celui qui a fait venir sur vous ces calamités, fera venir sur vous la joie éternelle, en assurant votre Salut. » Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon