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Chronique du Père Job an Irien : Liorzou/Jardins

Liorzou

E kement bered a zo, pe dost, e kaver bremañ ar pez a vez anvet «liorz an eñvor», da lavared eo eul lec’h reñket evid ma vefe gellet ingala ennañ ludu an dud aet da anaon. Aliez eo eul lec’h kloz, gand mein ha plant bleuniou ha gwez a-wechou. E Trelevenez, ’vel e kalz berejou all, eo bet greet kement-se meur a vloavez a zo dija gand tud a vicher. Med evidon-me ez-eus kaerroc’h : eur gwir leor a eñvor hag a garantez bet greet gand tud ar barrez hag ar gomun penn-da-benn d’ar voger a gloz ar vered e tu an hanternoz. Kempennet e oa bet gand an ti-kêr eur riblennad douar a dregont santimetrad ledanded e tu diavêz ar voger, hag e oa bet lakaet eur mintinvez evid dond da blanta. Pep hini a zigasas gantañ plant bihan euz e liorz : broenn-mor, roz-gouez, roz-ruz, glizin, raden, brulu gwenn…oll bleuniou diwar ar mêz koulz lavared evid eur vered diwar ar mêz. Bep tro ma tremenan a-hed ar voger-ze e soñjan eo eur gwir gomz a garantez a zo lavaret aze d’an oll dud a zo beziet er vered-se.

Da zul diweza miz mae e oa gouel ar mammou hag am-eus dalhet e pleg va skouarn klemm eur vaouez, a lavare din diouz ar mintin e Rumengol : «Va merc’h n’he-deus ket digaset din eur vleunienn, nag an disterra kartenn evid gouel ar mammou !.» Goude ar gousperou ’m-eus gwelet anezi en-dro, hag en taol-mañ e oa sederroc’h he fenn. «Galvet he-deus ahanon ! Ar bleuniou a ’n’em gavo warhoaz, emezi, hag hi he-unan dimerher, ar pez a zo gwelloc’h c’hoaz !»

Kement hag ober ano euz bleuniou, e teu soñj din euz ar vaouez-se hag he-doa pedet ahanon da weladenni he liorz, eul liorz kaer gand plant bleuniou ha gwez bihan. Dre ma tiskoueze din ar plant e lavare n’eo ket ano ar blantenn, med da genta anoiou he bugale – rag plantet he-doa eun dra bennag da vare pask kenta pep hini anezo – ha goude-ze ano ar gwaz pe ar vaouez pe ar bugel zokén e-noa kinniget dezi ar blantenn-ze. Lavared a rae : «Lod a ra leoriou poltriji, med evidon-me ar gwella leor poltriji eo al liorz, rag kement plantenn amañ a zigas soñj din ouz an hini e-neus roet anezi din.» Abaoe m’he-doa savet al liorz-se he doa kemeret ar pleg da eskemm plant gand he amezeien ha mignoned, hag eveljust lod euz an dud-se a oa dija aet da anaon. «Bez’ ez-eo, emezi, ’vel ma vefent ganin c’hoaz el liorz-mañ. Eul leor beo eo va liorz !» Ar bleuniou a c’hell lavared eur garantez veo !


Jardins

Dans tout cimetière, ou presque, on trouve maintenant ce que l’on appelle un «jardin du souvenir», c’est à dire un endroit bien aménagé où on pourrait répandre les cendres des défunts. C’est souvent un lieu clos, avec des pierres, des plants de fleurs et parfois des arbres. Ici à Tréflévénez, comme en beaucoup d’autres cimetières, cela a été réalisé il y a déjà quelques années par une entreprise spécialisée. Mais pour ma part, je trouve qu’il y a plus beau : un vrai livre de mémoire et d’amour réalisé par des gens de la paroisse et de la commune le long du mur de clôture du cimetière du côté nord. La municipalité avait fait préparer une bande de terre d’environ trente centimètres de largeur du côté extérieur du mur, et avait fixé une matinée pour venir planter. Chacun apporta de petits plants de son propre jardin : armérias, rosiers sauvages, rosiers rouges, bleuets, fougères, digitales blanches… toutes des fleurs de la campagne pour ainsi dire pour un cimetière de campagne. Chaque fois que je passe le long de ce mur, je pense que c’est une vraie parole d’amour qui est dite là à tous ceux qui sont enterrés dans ce cimetière.

Ce dernier dimanche de mai, c’était la fête des mères, et j’ai gardé au creux de l’oreille la plainte d’une maman qui me disait, le matin, à Rumengol : «Ma fille ne m’a fait parvenir ni une fleur, ni la moindre carte pour la fête des mères !» Je l’ai revue après les vêpres, et cette fois elle avait une tête plus sereine. « Elle m’a appelée ! Les fleurs arriveront demain, dit-elle, et elle-même mercredi, ce qui est encore mieux !»

Tant qu’à parler de fleurs, il me revient en mémoire cette femme qui m’avait invité à visiter son jardin, un magnifique jardin avec des plants de fleurs et des arbustes. Au fur et à mesure qu’elle me montrait les plants, ce n’est pas le nom des plants qu’elle me disait, mais d’abord le nom de ses enfants – car elle avait planté quelque chose à la communion de chacun d’eux – puis le nom de l’homme, de la femme ou de l’enfant qui lui avait donné tel ou tel plant. Elle disait : «Certains font des albums photos, mais pour moi le meilleur album-photo est le jardin, car chaque plant ici me rappelle celui qui me l’a donné.» Depuis qu’elle avait commencé ce jardin, elle avait pris l’habitude d’échanger des plants avec ses voisins et ses amis, et évidemment certaines de ces personnes étaient déjà décédées. «C’est comme si elles étaient encore avec moi, dit-elle, dans ce jardin. Mon jardin est un livre vivant !» Les fleurs peuvent dire un amour vivant !

Tad Job an Irien