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Chronique du Père Job an Irien : Feunteuniou a vuez !/ Fontaines de vie !

Feunteuniou a vuez !

E pleg va skouarn ema c’hoaz komzou va mamm-goz pa zisklêrie gwechall : « E Moustrabaol (Mousterpaul e Bodiliz ), abaoe m’o-deus stanket ar feunteun, e vez atao unan bennag o langissa !» Kavoud a rae e oa eun dra spontuz mouga eur feunteun, rag eviti ar feunteun ne oa ket eur poull-dour, med da genta eun eienenn kinniget d’an den evid e wella mad hag abalamour da ze gwarezet gand eur zant, amañ sant Paol a Leon. He c’homzou a zo deuet din en-dro da fin or studiadenn euz ilizou ha chapeliou Bro-Dreger vihan. E kreiz Bro-Gerne, e parrez vraz Santez-Anna Kastellin, e kaver eur feunteun e-kichenn 64% euz ar zavaduriou relijiel ; e Bro-Dreger vihan war-dro 25% hepkén ! Petra ’zo kaoz ? N’eo ket ar zavaduriou relijiel a vanke koulskoude er c’horn-bro-ze, peogwir on-eus kavet tres euz daou c’hant chapel pe iliz araog ar c’hantved diweza, eur c’hant anezo o veza bremañ eet da get.

Red eo lavared ez-eus bet tro-dro da Vontroulez e Bro-Dreger eun niver braz a japeliou prevez, chapeliou maneriou. Renablet on-eus 49 anezo, 26 o veza bet distrujet, ha 23 c’hoaz en o zav. Kalz euz ar chapeliou-ze a zo bet savet er 16ved ha 17ved kantved pa skoe kaled ar vosenn e Montroulez ha tro-dro. Gouzoud a reer da skwer e oe sammet ganti beteg mil tri c’hant a dud e Montroulez e 1597. Ar vosenn a ’em lede war ar vro dre ar porziou-mor ha Montroulez a ezporzie kalz lien d’ar mare-ze. Ar varhadourien-lien, pinvidikeet gand ar c’honwerz-se, a zavas neuze en o maneriou war ar mêz chapeliou evid beza gwarezet diouz ar c’hleñved spontuz. Med ral e oa d’ar chapeliou-se kaoud eur feunteun, rag gouestlet int bet aliez da zent brudet an Iliz : ar Werhez, Santez Anna, sant Jozef, Yann-Vadezour, Per, Jakez, Yann, Stefan, Barnabaz, Lorañs (kemeret gantañ plas sant Pabu-Tudual), ar zent brudet er grenn-amzer ‘vel Katell, Marharit, Barba, Anton, Fransez, Nikolaz, Fiek, Itrop, Klaoda, hag ive an daou zant a veze pedet eneb ar vosenn, Sebastian ha Rok. En diavêz d’ar zent Melar hag Erwan, n’eus ket kalz sent euz ar vro hag o-defe eur chapel war o ano e Bro-Dreger vian !

E kreiz Kerne e oa disheñvel. Kalz euz ar chapeliou eno a zoug ano eur zant euz ar vro, hini eun ermid hag e-noa desket ar vuez a vanac’h e manati Landevenneg, hag e-noa en em zachet goude-ze er zioulder tostig-tost ouz eur feunteun peurliesa diskoachet gantañ. Red e oa dezañ kaoud dour da veva, ha dour santel evid e bedennou. E plas ermitaj ar zant ez-eus bet savet eur chapel, darempredet gand an amezeien, hag ar re-mañ a zaremprede ive e feunteun, gwelet ganto ’giz eur feunteun a bareañs, dreist-oll pa zalee ar vugale da gomz pe da gerzed. Feunteuniou a vuez hirio c’hoaz !


Fontaines de vie !

J’ai encore au creux de l’oreille les paroles de ma grand-mère qui déclarait autrefois : «A Mousterpaul, Bodilis, depuis qu’ils ont bouché la fontaine, il y a toujours quelqu’un atteint de langueur !» Elle trouvait que c’était épouvantable d’étouffer une fontaine, car pour elle la fontaine n’était pas un trou d’eau, mais d’abord une source offerte à l’homme pour son plus grand bien et en raison de cela protégée par un saint, dans le cas saint Pol de Léon. Ses paroles me sont revenues à la fin de notre étude sur les églises et chapelles du Petit Trégor. Au milieu de la Cornouaille, dans la grande paroisse de Sainte-Anne de Châteaulin, on trouve une fontaine de dévotion auprès de 64% des édifices religieux; en Petit Trégor, seulement 25% ! Pourquoi ? Ce ne sont pourtant pas les édifices religieux qui manquaient dans cette région, puisque nous y avons trouvé trace de deux cents chapelles et églises avant le siècle dernier, dont une centaine a aujourd’hui disparue.

Il faut dire qu’il y a eu tout autour de Morlaix en Petit Trégor un grand nombre de chapelles privées, des chapelles de manoirs. Nous en avons repéré 49, 26 ont été détruites, et 23 sont toujours debout. Beaucoup de ces chapelles ont été édifiées aux XVIème et XVIIème siècles lorsque la peste frappait Morlaix et ses environs. On sait par exemple que mille trois cents personnes en furent victimes à Morlaix en 1597. La peste se répandait sur une région par les ports de mer et à l’époque Morlaix exportait beaucoup de toiles. Les marchands de toiles, enrichis par ce commerce, édifièrent alors dans leurs manoirs à la campagne des chapelles pour se protéger de la terrible épidémie. Mais ces chapelles avaient rarement une fontaine, car elles ont souvent été dédiées aux grands saints de l’Église : la Vierge, sainte Anne, saint Joseph, Jean-Baptiste, Pierre, Jacques, Jean, Étienne, Barnabé, Laurent (prenant la place de Pabu-Tudual), les saints renommés du moyen-âge, tels que Catherine, Marguerite, Barbe, Antoine, François, Nicolas, Fiacre, Eutrope, Claude, et les deux saints que l’on priait en temps de peste, Sébastien et Roch. En dehors des saints Mélar et Yves il y a peu de saints locaux à avoir une chapelle à leur nom en Petit Trégor !

En centre Cornouaille c’était différent. Beaucoup des chapelles y portent le nom d’un saint du pays, celui d’un ermite qui avait appris la vie monastique au monastère de Landévennec, et s’était ensuite retiré dans le silence auprès d’une fontaine qu’il avait le plus souvent découverte. Il lui fallait de l’eau pour vivre et de l’eau sainte pour ses prières. A l’emplacement de l’ermitage du saint on a édifié une chapelle, fréquentée par les voisins, et ceux-ci fréquentaient aussi sa fontaine, qu’ils considéraient comme fontaine de guérison, en particulier lorsque les enfants tardaient à parler ou à marcher. Des fontaines de vie aujourd’hui encore !

Tad Job an Irien